L’administration fiscale est tenue à compter de la date du jugement d’ouverture d’adresser l’avis de mise en recouvrement au liquidateur
Source :Conseil d’État 7/04/2023 n°456830 mentionné dans les tables du recueil Lebon
L’article L256 du Livre des Procédures Fiscales (LPF) dispose : « Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public compétent à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n’a pas été effectué à la date d’exigibilité ».
Pour la validité de la procédure de recouvrement et l’interruption de la prescription, il est essentiel que l’avis de mise en recouvrement (AMR) soit adressé à la bonne personne.
En l’espèce, la question à trancher porte sur le destinataire de l’AMR des suppléments d’impôts dus par une société en liquidation.
L’administration fiscale avait adressé l’AMR à la société et le liquidation soutenait que l’AMR aurait dû lui être adressé.
Le Conseil d’État tranche en faveur du liquidateur
Il rappelle les dispositions du code civil et du code de commerce applicables en cas de liquidation d’une société.
L’article 1844-8 du code civil dispose « La dissolution de la société entraîne sa liquidation, hormis les cas prévus à l’article 1844-4 et au troisième alinéa de l’article 1844-5. Elle n’a d’effet à l’égard des tiers qu’après sa publication ».
L’article L 622-9 (aujourd’hui L641-9) du code de commerce dispose « Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens composant le patrimoine engagé par l’activité professionnelle, même de ceux qu’il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur ».
Le Conseil d’État en déduit : « Il résulte de ces dispositions que les droits et actions du débiteur qu’elles visent incluent ceux qui se rapportent, le cas échéant, aux dettes fiscales de celui-ci, et, par suite, aux actes de la procédure d’imposition le concernant, tels que les avis de mise en recouvrement, qui sont susceptibles d’avoir une incidence sur son patrimoine. Dès lors, c’est au liquidateur que doit être adressé, dès la date du jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire, un avis de mise en recouvrement des impositions dues par la société en liquidation ».
Dans ces conditions, la société ne pouvait être le destinataire de tout acte de procédure de la part de l’administration. En l’espèce, il s’agissait de l’AMR mais la solution peut être transposée à l’avis de vérification ou à la proposition de rectification.
L’administration doit rendre destinataire de tous les actes de procédure le liquidateur et non à la société à compter de la date à laquelle l’administration a eu connaissance de la liquidation et au plus tard à la date de publication du jugement prononçant la mise en liquidation.
Néanmoins, le Conseil d’État précise que l’envoi au mauvais destinataire interrompt tout de même la prescription du droit de reprise de l’administration fiscale.
L’envoi au mauvais destinataire aura donc une incidence si l’AMR est envoyé à la suite d’un rectification ayant déjà interrompu le délai de reprise et si le délai pour recouvrir les suppléments d’impôts est expiré et n’a pas été valablement interrompu (4 ans à compter de l’envoi de l’AMR).