Résiliation d’une délégation de service public : le sort des engagements de l’ancien délégataire

Stéphanie TRAN
Stéphanie TRAN

 

 

SOURCE : CE, 19 décembre 2014, Commune de Propriano, req. n°368294

 

Par convention de délégation de service public du 5 mars 2003, la commune de Propriano avait confié à la société Yacht club international du Valinco la construction et l’exploitation de son port de plaisance.

 

Cette convention avait été résiliée, par délibération du conseil municipal du 4 septembre 2004, à raison des fautes commises par le délégataire.

 

M. A avait sollicité en tant qu’usager du port la condamnation de la commune de Propriano à l’indemnisation du préjudice né de l’inexécution par la personne publique du contrat de garantie d’usage d’un poste d’amarrage de longue durée qu’il avait conclu avec la société Yacht club international. Alors que le tribunal administratif avait rejeté la demande du requérant, les juges d’appel ont fait droit à cette dernière.

 

Saisi d’un pourvoi, le Conseil d’Etat a rappelé « qu’en cas de résiliation d’un contrat portant exécution d’un service public, quel qu’en soit le motif, la personne publique, à laquelle il appartient de garantir la continuité du service public et son bon fonctionnement, se substitue de plein droit à son ancien cocontractant pour l’exécution des contrats conclus avec les usagers ou avec d’autres tiers pour l’exécution même du service (…) ».

 

Pour préciser immédiatement après « qu’il n’en va toutefois ainsi que si les contrats en cause ne comportent pas d’engagements anormalement pris, c’est-à-dire des engagements qu’une interprétation raisonnable du contrat relatif à l’exécution d’un service public ne permettait pas de prendre au regard notamment de leur objet, de leurs conditions d’exécution ou de leur durée, à moins que, dans ce cas, la personne publique n’ait donné, dans le respect de la réglementation applicable, son accord à leur conclusion ».

 

Ainsi, le Conseil d’Etat en conclut que « pour l’application de ces règles, la substitution de la personne publique n’emporte pas le transfert des dettes et créances nées de l’exécution antérieure des contrats conclus par l’ancien cocontractant de la personne publique, qu’il s’agisse des contrats conclus avec les usagers du service public ou de ceux conclus avec les autres tiers ; ».

 

En résumé, la personne publique se substitue à l’ancien délégataire, concernant les engagements pris par ce dernier antérieurement à la résiliation de la convention de service public, que celle-ci ait été conclue avec des usagers du service public ou des tiers à celui-ci, sauf à ce qu’il s’agisse d’engagements « anormalement pris » au regard notamment de l’objet, des conditions d’exécution ou de la durée de la convention de délégation de service public

 

Dans ces conditions, le raisonnement des juges d’appel a été censuré eu égard à l’erreur de droit qu’ils avaient commise en jugeant :

 

– d’une part, que la commune de Propriano était tenue de venir aux droits de la société Yacht Club dans l’ensemble de ses rapports avec les usagers du port dès lors que la délégation de service public avait été résiliée ;

 

– d’autre part, que la commune ne pouvait ainsi se prévaloir de ce que le contrat conclu entre le requérant et cette société devait être regardée comme un engagement anormalement pris pour l’exploitation du service public.

 

Statuant alors au fond, le Conseil d’Etat a considéré qu’eu égard aux stipulations de la convention de service public, le contrat litigieux ne pouvait être regardé comme comportant un engagement que l’ancien délégataire pouvait normalement prendre pour l’exploitation du service public.

 

En effet, le requérant arguait en l’espèce de l’affectation privative d’un poste d’amarrage précisément localisé à son bénéfice alors même que la garantie d’usage de postes d’amarrage prévue au sein de la convention de délégation de service public était donnée pour l’accès à un poste dans une zone déterminée du port sans pour autant que l’affectation privative d’un ou plusieurs postes déterminés ne soit possible.

 

Stéphanie TRAN

Vivaldi-Avocats

 

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