SOURCE : Cass.3ème Civ., 20 avril 2017, n°16-10.486
C’est ce juge la Troisième Chambre Civile de la Cour de Cassation, dans cette décision, publiée au bulletin, comme suit :
« …
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Bordeaux, 12 novembre 2015), que, le 8 juillet 2008, M. et Mme X… ont conclu avec la société Maisons Côte Atlantique (la société MCA), assurée auprès de la société Camca assurances, deux contrats de construction de maison individuelle ; que les opérations ont été financées par deux prêts immobiliers consentis par la société BNP Paribas Invest Immo (la BNP) ; qu’une garantie de livraison a été délivrée par la Compagnie européenne des garanties immobilières (la CEGI) ; que M. et Mme X… ont réglé les appels de fonds au fur et à mesure et jusqu’à 95 % de l’avancement des travaux ; que, par devis accepté du 14 juin 2007, M. et Mme X… ont confié à la société Sicaud la réalisation de l’accès de chantier, le raccordement à l’égout, le réseau pluvial, l’adduction des fluides, la réalisation d’un parking, la réalisation d’une clôture et d’un terrassement ; que la société PLS, titulaire de deux mandats de gestion locative, a donné les immeubles en location à partir des 27 novembre et 11 décembre 2009 ; que, se prévalant d’irrégularités, de désordres et de retard, M. et Mme X… ont, après expertise, assigné la société MCA, la société Sicaud, la BNP et la CEGI en réparation de différents préjudices et que la société MCA a appelé en cause la société Camca, son assureur ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. et Mme X… font grief à l’arrêt de fixer à la date du 16 décembre 2009 la réception tacite des travaux réalisés par la société MCA, avec toutes conséquences de droit, alors, selon le moyen :
1°/ que la réception d’une maison individuelle édifiée dans le cadre d’un contrat de construction de maison individuelle doit être expresse et ne peut intervenir tacitement ; qu’en décidant néanmoins le contraire, pour en déduire que les travaux de construction de deux maisons individuelles réalisées au profit des époux X… avaient pu faire l’objet d’une réception tacite, la cour d’appel a violé les articles L. 231-6 et R. 231-7 du code de la construction et de l’habitation ;
2°/ que les parties peuvent convenir de ce que la réception des travaux devrait intervenir de manière expresse et exclure, ainsi, toute réception tacite ; qu’en décidant qu’une réception tacite était intervenue, sans répondre aux conclusions de M. et Mme X…, qui soutenaient qu’il avait été stipulé dans les contrats de construction de maison individuelle que la réception devrait intervenir en présence d’un professionnel, ce qui excluait toute réception tacite résultant de la prise de possession ou du paiement d’une partie du prix, la cour d’appel a privé sa décision de motifs, en violation de l’article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que la réception tacite ne peut résulter que de la volonté non équivoque du maître de l’ouvrage d’accepter les travaux ; que le paiement d’une partie seulement du prix de construction, même accompagnée d’une prise de possession, n’est pas de nature à caractériser une réception tacite ; qu’en se bornant néanmoins, pour décider que les maisons individuelles avaient fait l’objet d’une réception tacite au plus tard, le 16 décembre 2009, à relever que les prestations de la société MCA avaient été payées à hauteur de 95 % et que les locataires étaient entrés dans les lieux le 16 décembre 2009 pour le lot 8 et le 7 décembre 2009 pour le lot 38, la cour d’appel, qui n’a pas caractérisé une réception tacite des maisons individuelles par M. et Mme X…, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 231-6, R. 231-7 du code de la construction et de l’habitation et 1792-6 du code civil ;
Mais attendu qu’ayant retenu, à bon droit, que les dispositions applicables au contrat de construction de maison individuelle n’excluaient pas la possibilité d’une réception tacite et relevé que les prestations de la société MCA avaient été payées à hauteur de 95 % et que les locataires étaient entrés dans les lieux le 16 décembre 2009 pour le lot 8 et le 7 décembre pour le lot 38, ce dont il résultait une volonté non équivoque des maîtres de l’ouvrage d’accepter les travaux au plus tard le 16 décembre 2009, la cour d’appel, qui, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu fixer à cette date la réception tacite pour la société MCA, a légalement justifié sa décision de ce chef ;… »
La construction de maisons individuelles, avec ou sans fourniture de plans, est un secteur protégé.
La loi du 19 décembre 1990 règlemente ainsi la construction d’un immeuble à usage d’habitation ou d’un immeuble à usage professionnel et d’habitation ne comportant pas plus de deux logements destinés au même maître de l’ouvrage.
Par l’effet de l’article L 230-1 du Code de construction et de l’habitation, ces dispositions sont d’ordre public.
Cet arrêt de principe pose que dans la mesure où ces dispositions n’excluent pas la possibilité d’une réception tacite, cette dernière peut être retenue si, en parallèle, les conditions traditionnellement exigées en la matière par la jurisprudence, à savoir, règlement de la totalité du prix du contrat (à l’exception de la retenue de garantie) et prise de possession, sont réunies.
Kathia BEULQUE
Vivaldi-Avocats