Rapport d’expertise et principe du contradictoire

Kathia BEULQUE
Kathia BEULQUE - Avocat associée

 

SOURCE : Cass.3ème Civ., 15 novembre 2018, n°16-26.172

 

C’est ce que rappelle la Troisième Chambre Civile de la Cour de Cassation, dans cette décision, publiée au bulletin, comme suit :

 

« …

 

Sur le moyen unique : Attendu, selon l’arrêt attaqué (Reims, 21 juin 2016), que, le 31 mars 2009, la SCI Nick 54, devenue SCI Aurel 1, bailleresse, a notifié à la société MGB, cessionnaire du droit au bail commercial depuis le 22 avril 1998, une demande de révision du loyer selon la valeur locative du bien, puis a saisi le juge des loyers commerciaux d’une demande en fixation du loyer du bail révisé à une certaine somme ;

 

Attendu que la société MGB fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande d’expertise judiciaire, de retenir à une certaine somme la valeur locative du bien et de fixer, en conséquence, le montant du loyer révisé au 31 mars 2009, alors, selon le moyen, que le juge doit respecter et faire respecter le principe du contradictoire, qu’en fondant exclusivement sa décision sur l’expertise effectuée par M. D… et celle effectuée par le cabinet Roux quand il était constant que ces deux expertises n’avaient pas été réalisées contradictoirement, la cour d’appel a méconnu les principes du contradictoire et de l’égalité des armes, en violation de l’article 16 du code de procédure civile et de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

 

Mais attendu que, dès lors que ces éléments avaient été soumis à la libre discussion des parties, la cour d’appel, devant qui n’était pas invoquée une violation de l’article 6, § 1, précité, a pu, sans violer le principe de contradiction, se fonder sur le rapport d’expertise judiciaire établi lors d’une instance opposant la bailleresse à son associé et sur le rapport d’expertise établi unilatéralement à la demande de celle-ci, dont elle a apprécié souverainement la valeur et la portée ;

 

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

 

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;… » 

 

L’élaboration d’un rapport d’expertise judiciaire, nécessite de respecter le principe du contradictoire (voir notamment, l’article 160 du code de procédure civile, concernant les convocations).

 

A défaut la nullité du rapport peut être encourue (Cass. Ch. Mixte 28 septembre 2012, n°11-11.381).

 

La jurisprudence a toutefois admis :

 

qu’un rapport d’expertise judiciaire peut être opposé à un assureur qui n’avait pas été attrait à la procédure ayant conduit à la mesure d’expertise (Cass.2ème Civ. 8 juin 2017, n° 16-19.832).

 

qu’un rapport d’expertise extrajudiciaire (Civ.1ère, 24 septembre 2002, N°01-70.739),

 

pouvaient être pris en considération, s’ils avaient été régulièrement versés aux débats et soumis à la libre discussion des parties, à condition cependant que le rapport en question ne soit pas le seul élément de preuve utilisé par le juge.

 

Au cas d’espèce la Troisième Chambre a estimé que cette condition était remplie par la production d’une expertise officieuse et d’une expertise judiciaire étrangère à l’instance, qui étaient donc toutes deux dépourvues de caractère contradictoire, dans la mesure où elles se corroboraient et qu’elles avaient été soumises à la libre discussion des parties.

 

Kathia BEULQUE

Vivaldi-Avocats

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