Nullité du cautionnement hypothécaire donné par une SCI.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

SOURCE : Cass com., 23 septembre 2014, Arrêt n° 811 FS-P+B (n° 13-17.347).

 

Une société civile immobilière avait été constituée entre plusieurs personnes de la même famille, l’une d’entre elle exerçant une activité commerciale à titre personnel.

 

Cette personne ayant besoin d’un prêt de restructuration, elle se vit consentir un prêt, à condition qu’un cautionnement hypothécaire de la société soit fourni à la banque ; ce qui fut fait, la société ayant pris soin, au préalable, de modifier ses statuts afin de faire rentrer dans l’objet social la possibilité de permettre à la société de se porter caution solidaire et hypothécaire d’un associé.

 

Face à la défaillance du débiteur dans le remboursement du prêt, la banque assignait donc la SCI en saisie immobilière.

 

Toutefois, le Juge de l’Exécution va prononcer la nullité de la procédure de saisie immobilière en raison de la nullité de l’engagement de caution hypothécaire souscrit par la SCI, au motif que l’immeuble donné en garantie constituait le seul bien de la SCI et que celle-ci ne tirait aucun avantage de l’acte souscrit, mais s’exposait à perdre l’unique objet de son patrimoine, de sorte qu’elle mettait ainsi en jeu son existence même, cette opération étant contraire à l’intérêt social de la société et devait être jugée nulle, de sorte que sa nullité privait la saisie immobilière de tout titre exécutoire.

 

Ensuite de cette décision, la banque interjette appel et c’est ainsi que la Cour d’Appel d’AIX EN PROVENCE, dans un Arrêt du 07 décembre 2012, va confirmer la décision des premiers Juges, relevant qu’il était clair que l’engagement de caution qui n’entrait pas initialement dans l’objet de la société, n’y avait été incorporé que pour les besoins de l’obtention par l’associé de l’emprunt litigieux et en même temps que la décision de constituer la société caution hypothécaire de cet emprunt, et que cet extension de l’objet social de la société n’apportait rien d’autre que pure forme à l’engagement pris par la société et que c’est donc en vain que la banque prétendait trouver dans le fait que l’acte rentrait dans l’objet social de la SCI, un élément péremptoire de validité du cautionnement au regard de l’intérêt social qu’elle prétendait assimiler à l’objet social.

 

Par suite, la Cour confirmait la nullité de l’engagement pris par la SCI au profit de la banque.

 

Ensuite de cette décision, la banque se pourvoit en Cassation.

 

A l’appui de son pourvoi, elle fait valoir qu’est valable l’affectation hypothécaire consentie par une société civile immobilière en garantie de la dette d’un tiers dès lors que la conclusion d’un tel acte entre directement dans son objet social statutaire, qu’un acte qui entre dans l’objet social statutaire d’une société civile immobilière est conforme à l’intérêt social de cette dernière et qu’enfin les tiers sont fondés à se prévaloir de l’objet social de la société tel qu’il est défini par les statuts.

 

Mais la Haute Cour ne va pas suivre la banque dans son argumentation, relevant que n’est pas valide la sûreté accordée par une société civile en garantie de la dette d’un associé dès lors qu’étant de nature à compromettre l’existence même de la société, elle est contraire à l’objet social, qu’il en est ainsi même dans le cas où un tel acte entre dans son objet statutaire et qu’ayant constaté que l’immeuble donné en garantie du prêt consenti par la banque constituait le seul bien de la SCI, de sorte que cette dernière, qui ne tirait aucun avantage de son engagement, mettait en jeu son existence même, la Cour d’Appel a statué à bon droit.

 

Par suite, la Haute Cour rejette le pourvoi.

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

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