Fraude fiscale : cumul des procédures administratives et fiscales ?

Eric DELFLY
Eric DELFLY - Avocat associé

 

Source :CJUE, gr. ch., 26 févr. 2013, aff. C-617/10

 

Une juridiction suédoise a demandé à la CJUE si des poursuites pénales pour fraude fiscale peuvent être diligentées contre un prévenu, dès lors que ce dernier a déjà fait l’objet d’une sanction fiscale pour les mêmes faits de fausse déclaration. Elle s’interrogeait également sur la compatibilité avec le droit de l’Union de la pratique judiciaire suédoise qui subordonne l’obligation de laisser inappliquée toute disposition contraire à un droit fondamental garanti par la CEDH et par la Charte des droits fondamentaux à la condition que ladite contrariété ressorte clairement des textes ou de la jurisprudence concernés.

 

La CJUE décide :

 

1)    Le principe ne bis in idem énoncé à l’article 50 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ne s’oppose pas à ce qu’un État membre impose, pour les mêmes faits de non-respect d’obligations déclaratives dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée, successivement une sanction fiscale et une sanction pénale dans la mesure où la première sanction ne revêt pas un caractère pénal, ce qu’il appartient à la juridiction nationale de vérifier.

 

2)    Le droit de l’Union ne régit pas les rapports entre la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, et les ordres juridiques des États membres et ne détermine pas non plus les conséquences à tirer par un juge national en cas de conflit entre les droits garantis par cette convention et une règle de droit national.

 

 

Le droit de l’Union s’oppose à une pratique judiciaire qui subordonne l’obligation pour le juge national de laisser inappliquée toute disposition contraire à un droit fondamental garanti par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne à la condition que ladite contrariété ressorte clairement du texte de cette charte ou de la jurisprudence y afférente, dès lors qu’elle refuse au juge national le pouvoir d’apprécier pleinement, avec, le cas échéant, la coopération de la Cour de justice de l’Union européenne, la compatibilité de ladite disposition avec cette même charte.

 

Dont acte : le cumul d’une procédure administrative de redressement fiscal et pénale pour fraude fiscale reste possible , la procédure administrative n’ayant pas en France comme en Suède d’aspect pénal sauf à discuter de certaines pénalités comme la mauvaise foi qui ressemblent à s’y méprendre à une indemnité pénale à caractère administratif.

 

Le raisonnement serait différent s’il s’agissait du cumul de sanctions entre une Autorité Administrative Indépendante (AAI de type AMF ou Autorité de la Concurrence) et une juridiction pénale dont les sanctions ont toutes deux un caractère pénal .C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les parquets préfèrent citer les dirigeants des sociétés au pénal laissant ainsi l’AAI sanctionner la société.

 

Eric DELFLY

Vivaldi-Avocats

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