Étendue de la responsabilité des vendeurs d’actions au titre d’une garantie de passif en cas de pluralité d’acquéreurs

Caroline DEVE
Caroline DEVE - Avocat

Même en matière commerciale, la solidarité « active » ne se présume pas

Source :CCass, com, 24 janvier 2024, 20-13.755, Publié au bulletin

Les quatre associés d’une société cèdent l’intégralité de leurs actions à deux acquéreurs distincts : la quasi-totalité des titres sont cédés par les associés, par quatre actes, à une personne morale et le solde est cédé par l’un d’entre eux uniquement à une personne physique aux termes d’un cinquième acte. Chacune des cessions est assortie d’une garantie de passif.

Les acquéreurs mettent en œuvre la garantie et obtiennent, devant la Cour d’Appel, la condamnation solidaires des associés à leur payer une somme en réparation de leur préjudice.

La Cour d’Appel a considéré que l’opération était indiscutablement commerciale (cession du contrôle de la société) de sorte que la solidarité s’imposait et chacun des vendeurs avait une obligation envers chacun des acquéreurs. Il relève en outre que la clause de garantie de chacun des actes de cession ne limite pas la charge d’un passif antérieur révélé postérieurement à la cession à la proportion des droits sociaux cédés

L’arrêt fait l’objet d’un pourvoi les associés ayant uniquement cédé leurs titres à l’acquéreur personne morale estimant qu’ils n’avaient aucune obligation envers l’acquéreur personne physique, lequel ne pouvant se retourner qu’envers son vendeur.

La Cour de Cassation casse l’arrêt au visa de l’ancien article 1202 du code civil qui disposait « La solidarité ne se présume point ; il faut qu’elle soit expressément stipulée » (aujourd’hui, l’article 1310 du même code dispose « La solidarité est légale ou conventionnelle ; elle ne se présume pas ») et juge que la solidarité dont bénéficie l’acquéreur personne morale envers l’ensemble des associés ne peut produire d’effet à l’égard de l’autre acquéreur qui n’a contracté qu’avec un seul des associés.

Il faut ainsi distinguer la solidarité « passive » c’est-à-dire entre les débiteurs qui est présumée en matière commerciale de la solidarité « active » c’est-à-dire qui bénéficie aux créanciers qui ne se présume pas.

Un acte doit donc prévoir expressément que les créanciers pourront réclamer leurs créances à un seul des débiteurs.

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