SOURCE : Cass.3ème Civ., 2 juin 2016, n° 15-16.967
C’est ce que précise la Troisième Chambre Civile de la Cour de Cassation, dans cette décision, publiée au bulletin comme suit :
« …
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 26 février 2015), que, par acte du 13 octobre 2009, M. et Mme X… ont vendu à Mme Y… un appartement situé dans un immeuble soumis au régime de la copropriété d’une superficie de 131,07 m2, selon une attestation de la société Allo diagnostic ; qu’ayant fait mesurer le bien par un géomètre-expert, qui a retenu une superficie de 105,10 m2, Mme Y…a, les 24 et 29 juin 2010, assigné en référé M. et Mme X… qui ont appelé en intervention forcée la société Allo diagnostic et la société Daniel Féau conseil immobilier, agent immobilier par l’entremise duquel l’acquéreur avait été trouvé ; que, par ordonnance du 7 octobre 2010, le juges des référés a désigné un expert avec pour mission de mesurer le bien ; que dans son rapport déposé le 8 février 2011, l’expert a conclu à une superficie de 104,7 m2 ; que, par acte du 11 octobre 2011, Mme Y…a assigné M. et Mme X…en diminution du prix et la société Allo diagnostic et l’agent immobilier en dommages et intérêts ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme Y… fait grief à l’arrêt de déclarer forclose son action en diminution du prix alors, selon le moyen :
1/° que le délai d’un an pour agir en diminution du prix de la vente d’un lot dont la superficie est inférieure de plus d’un vingtième à celle exprimée dans l’acte est un délai de prescription et non un délai de forclusion ; qu’en l’espèce, pour juger tardive l’action intentée par Mme Y…, la cour d’appel a retenu que le délai pour agir en diminution de prix est un délai de forclusion, et ce au seul prétexte que la sanction prévue par le législateur en cas de tardiveté de l’action est une déchéance ; qu’en statuant ainsi, quand le délai pour agir en diminution de prix est un délai de prescription, la cour d’appel a violé l’article 46 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 ;
2/° que le délai de forclusion est suspendu lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d’instruction présentée avant tout procès, et il recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter du jour où la mesure a été exécutée ; qu’en l’espèce, pour juger tardive l’action intentée par Mme Y…, la cour d’appel a retenu que dès lors que le délai pour agir en diminution du prix constituerait un délai de forclusion, ce délai n’aurait pas été suspendu pendant que se déroulait la mesure d’expertise ordonnée en référé le 7 octobre 2010 ; qu’en statuant ainsi, quand, à supposer même que le délai litigieux ait constitué un délai préfix, il n’en aurait pas moins été suspendu pendant le cours de la mesure d’expertise, la cour d’appel a violé, par refus d’application, l’article 2239 du code civil ;
Mais attendu qu’ayant exactement retenu que le délai d’un an prévu par le dernier alinéa de l’article 46 de la loi du 10 juillet 1965 est un délai de forclusion et que la suspension de la prescription prévue par l’article 2239 du code civil n’est pas applicable au délai de forclusion, la cour d’appel en a déduit à bon droit que Mme Y… était forclose en son action en diminution du prix ;
… »
Le délai pour agir en réduction du prix de vente pour erreur de mesurage loi CARREZ, prévu à l’article 46 de la loi du 10 juillet 1965, est qualifié par la Cour suprême de délai de forclusion.
En conséquence, les dispositions de l’article 2239 du code civil qui précisent que le délai de prescription est suspendu durant le temps de la mesure d’expertise judiciaire, et ne recommence à courir qu’à compter du jour où la mesure a été exécutée, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, sont inapplicables.
Dès lors, au cas d’espèce, le délai de forclusion d’un an avait recommencé à courir à compter de l’ordonnance de référé rendue le 7 octobre 2010 de sorte que l’assignation au fond délivrée un an et quatre jours plus tard, le 11 octobre 2011 était tardive.
La Troisième Chambre Civile avait déjà précisé que les dispositions de l’article 2239 du code civil ne s’appliquaient pas au délai de forclusion d’un an de la garantie des vices apparents prévue à l’article 1642-1 du code civil, à charge de vendeur d’immeuble à construire (Cass. 3ème Civ., 3juin 2015, n°14-15.796).
Kathia BEULQUE
Vivaldi-Avocats