Dissolution de société civile : caractérisation de la paralysie de la société

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

SOURCE : Cass.com., 28 mai 2013, n° 540 F – D (n° 12-20.287).

  

Dans cette espèce, une société civile familiale d’exploitation agricole comptait parmi ses associés un père et ses quatre enfants.

 

A la suite d’une mésentente familiale, le père saisissait la justice d’une demande en dissolution  de la société civile, faisant valoir que la mésentente entre associés paralysait le fonctionnement de la société.

 

Les Juges du fonds vont apprécier différemment la demande introduite.

 

Tout d’abord, dans un premier temps, le Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG, par un Jugement du 18 mars 2010 rejeta les prétentions du demandeur, considérant qu’en dépit d’un conflit grave et ancien entre celui-ci et ses enfants, le fonctionnement de la société civile n’était pas pour autant paralysé et qu’en conséquence, la demande de dissolution devait être rejetée.

 

Quant à elle, la Cour d’Appel de COLMAR, dans un Arrêt du 17 avril 2012, va considérer, au contraire, que le fonctionnement de la société se trouve paralysé par la mésentente entre associés dans la mesure où il résulte des statuts de la société que toutes les décisions collectives, y compris les décisions ordinaires, sont soumises à la règle de l’unanimité et qu’en conséquence, la mésentente entre associés, qui était par ailleurs admise par l’ensemble des parties, rendait impossible l’adoption d’une décision excédant les pouvoirs reconnus au gérant, de sorte que les comptes de la société n’avaient jamais été approuvés depuis l’exercice 2003.

 

En conséquence, la Cour d’Appel considère qu’il y a lieu de prononcer la dissolution anticipée de la société.

 

Ensuite de cette décision, les enfants se pourvoient en Cassation.

 

La Haute Cour va accueillir leur demande, considérant, au contraire de la Cour d’Appel, que l’impossibilité d’adopter des décisions collectives unanimes en raison de la mésentente entre associés, rendant ainsi impossible l’adoption d’une décision excédant les pouvoirs reconnus au gérant et en particulier l’approbation des comptes de la société depuis l’exercice 2003, ne sont pas des éléments propres à établir que la mésentente entre les associés paralyse le fonctionnement de la société, de sorte qu’elle casse et annule dans toutes ses dispositions l’Arrêt rendu par la Cour d’Appel de COLMAR.

 

En d’autres termes, le refus d’approuver les comptes sociaux, quand bien même répété sur plusieurs exercices consécutifs, ne suffit pas à démontrer la paralysie de la société.

 

Il est à noter que cette décision concerne une société civile qui n’est donc pas tenue de déposer ses comptes annuels auprès du Greffe du Tribunal de Commerce où elle est immatriculée, de sorte que l’on peut s’interroger sur la décision qu’aurait rendue la Haute Cour en matière de société commerciale où l’approbation des comptes constitue l’un des temps forts des réunions collectives entre associés.

 

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

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