Bail commercial, absence d’état des risques et pollutions : pas de résolution sans « gravité suffisante » !

Alexandre BOULICAUT
Alexandre BOULICAUT - Juriste

La troisième chambre civile juge que l’absence de communication d’un état des risques et pollutions daté de moins de six mois, lors de la conclusion du bail commercial, n’est susceptible d’entrainer la résolution du bail, que lorsque le manquement revêt une gravité suffisante appréciée in concreto.

SOURCE : Cass civ 3ème, 21 septembre 2023, n°22-15850, Inédit

L’arrêt rendu par la Cour de cassation le 21 septembre dernier s’inscrit dans le cadre d’un contentieux qui oppose les parties à bail commercial, sur les conséquences liées à l’absence de communication lors de la signature du contrat, d’un état des risques naturels et technologiques daté de moins de six mois.

Plus précisément, la troisième chambre civile est saisie d’un pourvoi formé par le bailleur à l’encontre d’un arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris le 2 février 2022[1], lui-même rendu sur renvoi après cassation[2], arrêt qui avait à l’époque fait les honneurs d’un commentaire CHRONOS[3].

Pour mémoire, la Cour d’appel de Paris avait fait droit à la demande du locataire poursuivi par son bailleur en paiement des loyers commerciaux, de résolution du contrat ab initio consécutivement à l’absence de communication lors de sa signature, d’un état des risques naturels et technologiques daté de moins de 6 mois, sans avoir à justifier d’un quelconque préjudice.

En statuant ainsi, la Cour d’appel de Paris était entrée frontalement en résistance avec la jurisprudence de la Haute juridiction[4], à l’instar auparavant de la Cour d’appel de Versailles[5] qui avait jugé dans un arrêt du 15 janvier 2019, que le bailleur avait manqué à son devoir d’information en n’annexant pas au bail l’état des risques naturels et technologiques de la zone, daté de moins de six mois (arrêt censuré et renvoyé devant la Cour d’appel de Paris) ; et la censure prévisible.

Dans son arrêt du 21 septembre 2023, la troisième chambre civile juge aux termes d’une motivation similaire à celle de son arrêt du 10 septembre 2020, que :

« En se déterminant ainsi, sans rechercher si le manquement imputé à la bailleresse était d’une gravité suffisante, dans les circonstances de l’espèce, pour justifier la résiliation du contrat de location, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ». 

L’arrêt est donc sans surprise, à nouveau censuré et renvoyé devant la Cour d’appel de Paris.

Enfin, et pour mémoire, le Décret n°2022-1289 du 1er octobre 2022 relatif à l’information des acquéreurs et des locataires sur les risques[6], a renforcé le devoir d’information des bailleurs à l’égard des  locataires d’immeubles commerciaux, à chaque étape de la location, pour tout bien situé à l’intérieur d’une zone concernée par un ou plusieurs risques naturels ou technologiques ou par un secteur d’information sur les sols[7].


[1] CA PARIS, 2 février 2022, n°20/14673, Société Galliéni Nanterre c/ Société Pinon

[2] Cass. civ 3ème, 10 septembre 2020, n°19-13760, Inédit

[3] https://vivaldi-chronos.com/bail-commercial-etat-des-risques-naturels-et-technologiques-sanctions/

[4] En ce sens, Cass. civ 3ème, 10 septembre 2020, n°19-13760 précité

[5] CA VERSAILLES, 15 janvier 2019, n°16/07715

[6] https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000046362782

[7] https://vivaldi-chronos.com/bail-commercial-obligation-dinformation-du-bailleur-etat-des-risques-et-pollutions/

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