Sources : D. n° 2013-1107, 3 déc. 2013 JO 5 déc. 2013
La loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 a créé une majoration de 10 % du montant du redressement de cotisations et contributions sociales mis en recouvrement à l’issue d’un contrôle lorsqu’est constatée l’absence de prise en compte des observations notifiées lors d’un précédent contrôle. Par ailleurs, elle a institué une majoration de 25 % du montant du redressement de cotisations et contributions sociales mis en recouvrement à l’issue d’un contrôle en cas de constat de travail dissimulé[1].
Le décret ici commenté précise la procédure applicable permettant en particulier d’assurer le respect du principe du contradictoire (art. 8 et 11) et prévoit que la première des majorations est appliquée si les observations effectuées lors du précédent contrôle ont été notifiées moins de cinq ans avant la date de notification des nouvelles observations constatant le manquement aux mêmes obligations (art. 4 et 21).
La LFSS pour 2013 a également modifié les dispositions prévoyant l’annulation des exonérations et réductions de cotisations et contributions sociales dont a bénéficié un donneur d’ordre en cas de travail dissimulé chez un de ses sous-traitants : à la notion de complicité avec le sous-traitant, difficile à établir en pratique, a été substitué le critère tenant au fait que le donneur d’ordre n’a pas procédé aux vérifications permettant de détecter l’existence de travail dissimulé chez le sous-traitant (art. 101 ). Le décret précise la procédure applicable au redressement correspondant (art. 2).
Sous ses aspects anodins, la LFSS 2013 et son décret d’application vont élargir notablement l’assiette des personnes physiques ou morales susceptibles de répondre au redressement consécutif au travail dissimulé.
En effet :
A reprendre pour acquis au droit social la définition de l’article L121-7 du Code pénal, le complice est la personne qui « sciemment, par aide ou assistance, en a facilité la préparation ou la consommation » (délit de travail dissimulé) ou celui qui par « don, promesse, menace, ordre, abus d’autorité ou de pouvoir aura provoqué à une infraction ou donné des instructions pour la commettre. » Pour être plus précis, n’est complice que celui contre lequel on démontre un acte positif, de sorte que la preuve en ce domaine était assez rarement rapportée
Changement d’arme avec la LFSS 2013 qui, en définitive, déconnecte l’infraction pénale de complicité de travail dissimulé avec le redressement qui peut désormais atteindre des personnes pénalement non complices mais qui ont par leur négligence ou imprudence facilité l’infraction.
Le législateur aborde ici la théorie de la connaissance obligée où « la personne qui ne pouvait ignorer ». Ce qui conduit à instaurer pour chaque opération de sous-traitance une obligation de vigilance et un devoir de renseignement. Faute d’avoir satisfait à ses obligations, l’entrepreneur sera solidairement tenu du même redressement que l’auteur de l’infraction
C’est donc une véritable révolution culturelle qui se mettrait en place pour les usagers de la sous-traitance. La problématique est différente pour les professionnels du droit qui connaissent, pour la pratiquer dans d’autres matières, cette obligation. On relèvera ainsi pour mémoire l’interdiction pénale de blanchiment et les obligations administratives qui, au-delà de toute infraction peuvent sanctionner toute personne répondant notamment de l’ACPR pour de simples défaillances aux procédures de contrôle interne de lutte contre le blanchiment. En matière fraude à la TVA notamment, on relèvera également l’apparition de la théorie de la connaissance obligée qui interdit une entreprise commerciale assujettie à la TVA de déduire la TVA payée lorsqu’elle a, par négligence, collaboré avec l’entreprise qui a collecté la TVA, à une opération qui ne pouvait conduire qu’à une fraude fiscale.
Vivaldi Chronos ne peut que conseiller à ses lecteurs de mettre en place des procédures de contrôle interne, sous forme de charte, à destination de la sous-traitance : Cette charte se composera de 3 volets susceptibles d’être remis à la DIRECTE en cas de contrôle :
– Un premier volet documentaire sous forme de QCM à remplir par l’entreprise permettant de vérifier que le sous-traitant est en règle avec la législation française et éventuellement avec celle de son pays d’origine ;
– Un second volet dans lequel la matérialité de certaines réponses serait consignée notamment, la justification que le sous-traitant a procédé à ses obligations déclaratives.
– Un troisième volet sous forme de déclaration sur l’honneur à remplir par le sous traitant.
A défaut la combinaison de la LFSS 2013 et du décret ci-avant commenté risque d’être la source de nouvelles et sérieuses déconvenues en ce domaine.
Ses dispositions entreront en vigueur le 1er janvier 2014, à l’exception de celles prévues à l’article 2 qui trouvent à s’appliquer dès le 6 décembre 2013 (lendemain de la publication au Journal officiel).
Vivaldi-Avocats
[1]L. n° 2012-1404, 17 déc. 2012, art. 98.