SOURCE : Cass.3ème Civ., 18 mai 2017, n°16-11.260
C’est ce que précise la Troisième Chambre Civile de la Cour de Cassation, dans cette décision, publiée au bulletin, comme suit :
« …
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 2 décembre 2015), qu’en 1999, Mme X…a entrepris des travaux de restructuration de son appartement, comprenant l’allongement d’une mezzanine et la création d’une galerie et de deux salles de bains ; que M. Y…, architecte d’intérieur, agissant au nom de l’EURL Marc Y…, assurée auprès de la société Mutuelle des architectes français (la MAF), a été chargé de la maîtrise d’oeuvre ; que les travaux de maçonnerie ont été confiés à la société Spiga, assurée auprès des sociétés Axa et SMABTP ; qu’après résiliation amiable des contrats, en octobre 1999, et paiement des travaux réalisés, Mme X… a emménagé dans les lieux en l’état, a obtenu en référé le remboursement de sommes trop perçues par le maître d’oeuvre et a assigné en indemnisation l’EURL Marc Y…, qui a appelé en garantie la MAF, la société Spiga et ses assureurs ;
Sur les troisième et quatrième moyens du pourvoi principal, ci-après annexés : Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu l’article 1792-6 du code civil ;
Attendu que, pour rejeter la demande de constatation de la réception tacite, l’arrêt retient que Mme X… a mis fin unilatéralement aux travaux, puis a décidé de vivre dans le chantier inachevé et dangereux pendant six ans, sans aval de l’architecte, et qu’il ne saurait être admis qu’une réception même tacite est intervenue, un tel acte se faisant de façon unique à la fin des travaux en présence de l’architecte, et que Mme X… n’a jamais sollicité qu’un tel acte intervienne et n’a protesté que six ans après l’occupation par elle des locaux sans formuler aucune réserve ;
Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait relevé que Mme X… avait pris possession de son appartement, en octobre 1999, avant l’achèvement des travaux et qu’à cette date, elle avait payé le montant des travaux déjà réalisés, ce qui laissait présumer sa volonté non équivoque de recevoir l’ouvrage, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ; …
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il refuse de fixer au mois d’octobre 1999 la réception tacite des travaux relatifs à la mezzanine et à la douche et de retenir que la responsabilité de la société Spiga et de l’EURL Marc Y… était engagée sur le fondement de l’article 1792 du code civil, que les sociétés Axa et MAF devaient garantir leurs assurés respectifs au titre de la police de responsabilité décennale, et condamne in solidum la société Spiga, l’EURL Marc Y… et la MAF à payer à Mme X… la seule somme de 5 888 euros au titre des désordres affectant la mezzanine et la douche, rejette la demande de l’EURL Marc Y… de condamnation de Mme X… à lui payer la somme de 23 986, 80 euros en règlement des travaux de menuiserie réalisés, l’arrêt rendu le 2 décembre 2015, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; … »
La réception peut intervenir même si les travaux ne sont pas achevés, dès lors que l’ouvrage est en état d’être habitable (Cass. 3ème Civ., 24 novembre 2016, n° 15-26.090), ce qui était le cas en l’espèce, puisque le maître d’ouvrage avait vécu dans son appartement pendant six ans.
La réception tacite pouvait donc être retenue puisqu’il avait, à l’époque payé les travaux réalisés, ce qui lui permettait de rechercher la responsabilité civile décennale des locateurs d’ouvrage, sur le fondement des dispositions de l’article 1792 du Code Civil, et la garantie consécutive de leurs assureurs responsabilité civile décennale.
Kathia BEULQUE
Vivaldi-Avocats