Rappel : L’action en responsabilité du fait des produits défectueux de l’article 1386-1 du Code civil a une porté limité.

Sylvain VERBRUGGHE
Sylvain VERBRUGGHE

 

 

SOURCE : 1ère civ, 14 octobre 2015, n°14-13847, F-P+B

 

Le régime de la responsabilité du fait des produits défectueux, prévu aux articles 1386-1 et suivants du Code civil, est issu de la transposition de la directive européenne n° 85/374/CEE du 25 juillet 1985 qui uniformisait au niveau européen la responsabilité des producteurs de produits défectueux causant un dommage aux personnes ou aux biens autres que le produit défectueux lui-même, au sens de l’article 9 de la directive.

 

La réparation du préjudice d’une victime de la défectuosité d’un produit, au sens des articles 1386-1 et suivant du Code civil, ne vaut donc que pour les dommages à la personne, au titre desquels figure le préjudice corporel, et les dommages aux biens d’une valeur, fixée par un décret du 11 févr. 2005 (n° 2005-113) à 500 €.

 

Le dommage au produit lui-même, les préjudices moraux et financiers satellites sont nécessairement exclus du champ d’application de ces dispositions, ce que rappelle l’article 1386-2 du code civil, eu égard à la nature indemnitaire de l’action de la victime.

 

La Cour d’appel d’Aix en Provence avait « oublié » tant les fondements de ces dispositions, que les dispositions de l’article 1386-2 dudit code, et condamné un fabricant de mât à réparer le préjudice financier de son client, constitué :

 

        De la remise en état du navire ;

 

        De l’indemnisation de la perte de loyers

 

        De l’indemnisation du préjudice de jouissance consécutif à une impossible utilisation du bien.

 

Rappelant sa jurisprudence, la Cour de cassation censure l’arrêt :

 

« Vu l’article 1386-2, alinéa 2, du code civil ;

 

Attendu qu’il résulte de ce texte que le régime de la responsabilité du fait des produits défectueux ne s’applique pas à la réparation du dommage qui résulte d’une atteinte au produit défectueux lui-même ;

 

Attendu que, pour condamner la société Hanse Yachts à réparer les dommages constitués par le coût des travaux de remise en état du bateau ainsi que par les pertes de loyers et le préjudice de jouissance résultant de l’impossibilité de l’utiliser, l’arrêt retient que c’est par une exacte application de l’article 1386-1 du code civil que le tribunal a retenu la responsabilité de cette société ;

 

Qu’en statuant ainsi, alors qu’il n’était pas constaté que la défectuosité du produit consistait en un défaut de sécurité ayant causé un dommage à une personne ou à un bien autre que le produit défectueux lui-même, la cour d’appel a violé le texte susvisé ; »

 

L’affaire est donc renvoyée devant la Cour d’appel de Montpellier qui n’aura sans doute d’autre choix que de débouter la victime, à charge pour elle de saisir la juridiction du fond territorialement compétente, sur le fondement du droit commun de la responsabilité contractuelle (article 1147 du Code civil) ou sur la garantie des vices cachés (article 1641 du Code civil).

 

Sylvain VERBRUGGHE

Vivaldi-Avocats

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