Point de départ du délai de prescription de l’action directe de la victime contre l’assureur du responsable

Amandine Roglin
Amandine Roglin

Le point de départ de la prescription de l’action directe de la victime contre l’assureur du responsable doit être fixé au jour où la victime a eu connaissance de l’identité de l’auteur des faits et de son assureur.

Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 24 novembre 2022, 21-16.721

I –

Une maison a été incendiée le 5 février 2012.

L’auteur des faits est un enfant mineur.

Les parents ont été condamnés par un Tribunal pour Enfants statuant sur les intérêts civils à réparer le préjudice matériel subi par la Commune.

Le jugement était opposable à l’assureur des parents, intervenu volontairement en la cause.

En cause d’appel, l’intervention volontaire de cet assureur a été jugée irrecevable de sorte que le jugement ne lui était pas opposable.

La Commune a ensuite assigné en référé, le 11 février 2019, l’assurance de responsabilité des parents de la victime en vue d’obtenir la garantie de cet assureur à titre provisionnelle au titre des condamnations mises à la charge de ses assurés par le Tribunal pour Enfants.

En cause d’appel, l’action directe de la victime est déclarée irrecevable comme prescrite :

« Le délai de prescription de l’action directe engagée contre la société Swislife le 11 février 2019 n’avait pu commencer à courir à compter de la date à laquelle [M] [C] avait été cité en qualité de prévenu, soit le 25 mars 2014,(…) au motif que la déclaration d’irrecevabilité de l’intervention volontaire de la Société Swisslife avait privé cette demande incidente de son effet interruptif de prescription ».

En d’autres termes, selon la Cour d’appel, le point de départ de l’action directe de la victime se situait à la date du sinistre.

II –

Un pourvoi en cassation est formé par la Commune.

La Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt rendu par la Cour d’appel en ces termes :

« Vu l’article 2224 du code civil et l’article L. 124-3 du code des assurances :

Il résulte de ces textes que l’action directe du tiers lésé à l’encontre de l’assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

Pour déclarer l’action de la commune d’Epiais et de son assureur irrecevable, l’arrêt qui rappelait que ces derniers se prévalaient d’un point de départ de la prescription différé au jour où ils avaient eu connaissance de l’identité de l’assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable, se borne à retenir que la prescription était acquise depuis le 6 février 2017 et qu’elle n’avait ni été interrompue ni suspendue par l’intervention volontaire de l’assureur dans l’instance pénale sur intérêts civils, fixant ainsi le point de départ de la prescription au 5 février 2012, soit la date de l’incendie.

En se déterminant ainsi, par un motif inopérant tiré de l’absence d’interruption de la prescription, et sans rechercher, comme elle y était invitée par la commune d’Epiais et son assureur, la date à laquelle ils avaient eu connaissance de l’identité de l’auteur des faits et de celle de l’assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ».

III –

La Haute juridiction rappelle qu’au sens des dispositions de l’article 2224 du code civil et de l’article L.124-3 du code des assurances, l’action directe du tiers lésé à l’encontre de l’assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

Pour rappel, l’action directe de la victime contre l’assureur se prescrit par le même délai que l’action en responsabilité civile de la victime contre le responsable du dommage.

La prescription biennale prévue à l’article L .114-1 du Code des assurances, qui n’est applicable que dans les relations entre l’assuré et l’assureur est sans incidence, sur le cours de la prescription de l’action directe du tiers lésé contre l’assureur.

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