Le statut des baux commerciaux ne s’applique pas aux conventions portant sur des biens dépendant du domaine public, même déclassés postérieurement à la convention

Sylvain VERBRUGGHE
Sylvain VERBRUGGHE

 

SOURCE : 3ème civ, 19 novembre 2014, n°13-20089, Publié au Bulletin

 

Il résulte des dispositions des articles L145-2 du Code de commerce et L2122-1 à L2122-3 du Code général de la propriété des personnes publiques que le statut des baux commerciaux ne s’applique pas aux conventions, même entre personnes privées[1], ayant pour objet des biens dépendant du domaine public, et que, si un fonds de commerce peut être y exploité[2], toute occupation sera réalisé par concession, temporaire, précaire et révocable.

 

C’est dans ces conditions que France Télécom a consenti en 1995 à l’Etablissement public La Poste une convention d’occupation précaire pour une durée de 30 ans sur un immeuble appartenant au domaine public.

 

A la suite de la privatisation de France Télécom, l’immeuble a été déclassé et vendu à une société de droit privé, laquelle a considéré que ce déclassement valait caducité de la convention d’occupation précaire, et application du statut des baux commerciaux. Sur cette base, le bailleur a délivré congé avec offre d’indemnité d’éviction à la société la Poste, et sans réponse de sa part dans les deux ans, l’a assignée en expulsion.

 

En réponse, la Poste, rappelait que les parties étaient tenues par une convention d’occupation précaire jusqu’en 2023, peu important le déclassement de l’immeuble.

 

Le bailleur lui oppose la prescription biennale[3]. En effet, pour contester le congé, La Poste devait agir dans les 2 ans.

 

Les juges du fond, tout comme la Cour de cassation, rejettent ses prétentions.

 

Rappelant sa jurisprudence[4], selon laquelle la décision de déclasser un bien du domaine public n’affecte pas la convention d’occupation précaire à défaut d’intention de nover, la Haute juridiction ajoute que le statut des baux commerciaux ne pouvant s’appliquer à la convention, la prescription biennale n’a pas pu courir.

 

C’est donc à la date de conclusion de la convention, et non à la date de délivrance du congé, qu’il faut se placer pour déterminer si le statut des baux commerciaux est applicable ou non. Si le statut n’est pas applicable, il est inutile pour le bailleur de tenter un passage en force.

 

Plus généralement, cette jurisprudence rappelle que les conditions de la convention d’occupation précaire doivent s’apprécier à la date à laquelle celle-ci est consentie, peut important les évènements intervenus ultérieurement.

 

Sylvain VERBRUGGHE

Vivaldi-Avocats

 


[1] 3ème civ, 20 décembre 2000, n°99-10896

[2] Cf notre article du 19 mars 2014, Une activité de marchand ambulant exploitée par concession d’emplacement peut être un fonds de commerce.

[3] Article L145-60 du Code de commerce

[4] 3ème civ, 17 mai 2011, n°10-19175 ; 3ème civ, 6 février 2013, n°11-20207

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