Copropriété et commerces

Kathia BEULQUE
Kathia BEULQUE - Avocat associée

 

 

SOURCE : CA Paris, pôle 4, 2ème ch., 30 octobre 2013

 

C’est ce qu’a décidé le Seconde Chambre du pôle 4 de la Cour d’appel de Paris, dans cette décision intéressante, ci -après reprise, la Cour motivant son arrêt sur l’interdiction, de porter atteinte, sauf à l’unanimité, aux modalités de jouissance des parties privatives :

 

« …

La SCI Poincaré est propriétaire, dans l’immeuble en copropriété sis (…), du lot n°1 de l’état descriptif de division correspondant à un local commercial en rez-de- chaussée, du lot n°27 correspondant à une cave au 1er sous-sol et du lot n°77 correspondant à un parking au 5ème sous-sol.

 

Par bail commercial en date du 19 juillet 2004, la SCI Poincaré a loué ces locaux à la société Lesk pour y exercer une activité de « fabrication et vente de produits de boulangerie, pâtisserie, viennoiserie, en gros ou en détail, à consommer sur place et/ou à emporter, la restauration rapide, café et salon de thé », la société Lesk ayant loué aux mêmes fins le lot voisin appartenant la SCI Avissac et réuni les deux lots pour les besoins de son exploitation.

 

Aujourd’hui, la société Lesk a quitté les lieux, les locaux de la SCI Poincaré 16 étant loués à une société qui y exerce un commerce de vente d’articles de salles de bains et ceux de la SCI Avissac étant loués à une société de restauration rapide »sans conduite de cheminée ».

 

Le règlement de copropriété stipule que l’immeuble est à usage principal d’habitation et précise : « les locaux commerciaux au rez-de-chaussée pourront être utilisés pour tous commerces ou toutes activités à condition qu’ils ne soient pas de nature à porter atteinte à la qualité de l’immeuble, à sa solidité ou à la tranquillité de ses occupants par le bruit, l’odeur, les vibrations notamment .

 

Sont notamment interdits, les commerces de poissonnerie et la vente de produits « à la criée », ainsi que les messageries, les entreprises de coursiers, les sex shop, boîtes de nuit, cours de danse, de musique ou de chants, les ateliers de couture et les métiers de petits marteaux ».

 

Lors de l’assemblée générale du 6 mai 2008, les copropriétaires ont adopté, à la majorité de l’article 26, une résolution n°14 rédigée ainsi que suit : « après avoir rappelé les dispositions du règlement de copropriété, l’état des procédures et l’incendie du 30-31 mars 2008, et après en avoir délibéré, l’assemblé générale décide, qu’en conformité avec les dispositions du règlement de copropriété, interdisant tous commerces sources de troubles, désordres ou nuisances, sont également interdits les commerces nécessitant une cuisson sur place, par quelque mode que ce soir ( notamment four, chaleur, électricité).

 

(….)

Il convient toutefois d’ajouter que le syndicat des copropriétaires ne peut pas valablement soutenir que la résolution querellée pouvait être adoptée à la majorité de l’article 26 au motif qu’elle n’emporterait ni ajout, ni modification du règlement de copropriété portant atteinte aux modalités des parties privatives, ledit règlement ne visant pas de façon limitative les nuisances ou les commerces interdits alors que ledit règlement pose pour principe le droit d’utiliser les locaux commerciaux du rez-de –chaussée pour tous commerces ou toutes activités et que seules sont interdites, par exception, les activités de nature à porter atteinte à la qualité de l’immeuble, à sa solidité ou à la tranquillité de ses occupants par le bruit, l’odeur, les vibrations notamment, avec une liste, certes non limitative, des commerces et activités interdites parce que générant, de par leur nature même, les nuisances interdites ;

 

La résolution querellée indiquant : « sont également interdits les commerces nécessitant une cuisson sur place, par quelque mode que ce soit (notamment four, chaleur, électricité) » constitue, non une précision, mais un ajout restrictif à la liberté de principe posée par le règlement de copropriété dans la mesure où ces commerces nouvellement interdits, de par leur nature, ne sont pas générateurs de nuisances prohibées ;

 

Dans ces conditions, la résolution querellée est de nature à porter atteinte aux modalités de jouissance des parties privatives, nécessitant un vote à l’unanimité des copropriétaires(…). »

 

Kathia BEULQUE

Vivaldi-Avocats

 

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