Attention à la validité de la clause limitant dans le temps la poursuite de la caution par le créancier

Geneviève FERRETTI
Geneviève FERRETTI

 

 

SOURCE : Cass. com., 1er octobre 2013. Pourvoi n° Q 12-21.704. Arrêt n° 994 FS-P+B

 

Le Crédit Lyonnais (la caution) s’est porté caution solidaire envers la société Groupama (le bailleur) du paiement des sommes représentant douze mois de loyer que pourraient devoir les preneurs, en exécution d’un contrat de bail, pour une durée de 6 ans.

 

Une ordonnance de référé ayant prononcé la résiliation du bail, la caution, a été mise en demeure d’exécuter son obligation par lettre recommandée, puis fut assignée en paiement par son bailleur.

 

La caution lui a opposé la caducité de son engagement contractuel soutenant que sa garantie n’avait pas été appelée dans le délai contractuel.

 

La cour d’Appel de Lyon a condamné la caution au paiement des sommes.

 

La Cour après avoir reproduit la clause du bail, aux termes de laquelle « l’engagement deviendra caduc et ne pourra plus être mis en jeu pour quelque cause que ce soit, à l’expiration d’un délai de trois mois (la date de réception de la lettre de mise en jeu du bailleur au domicile élu par la caution faisant foi) à compter de la date de prise d’effet d’une éventuelle résiliation anticipée du contrat de bail par l’une ou l’autre des parties à la convention et pour quelque cause que ce soit » considère que le délai contractuel étant un délai de prescription, il ne saurait être réduit à moins d’un an, et ce en application de l’article 2254 du Code Civil.

 

La Cour d’Appel conclut donc que la clause insérée dans le bail et dont la caution entendait se prévaloir n’est pas opposable au bailleur.

 

La caution forme un pourvoi en cassation à l’encontre de l’arrêt rendu par la Cour d’Appel.

 

Voici ce qui a été jugé :

« Attendu qu’en statuant ainsi, alors que la caution était fondée en application de la convention des parties à invoquer le non-respect du délai expressément prévu pour la mise en jeu de son engagement, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, CASSE ET ANNULLE ».

 

Dans cette affaire, la question que la Haute Cour a eu à trancher était de savoir si le délai contractuel réduisant le droit de poursuite à l’encontre de la caution par le créancier doit être qualifié de délai de prescription ou être considéré comme un délai de forclusion.

 

L’enjeu est de taille puisque si le délai de prescription ne peut être conventionnellement réduit à moins d’un an (article 2254 du Code Civil), le délai de forclusion (article 2220 du Code Civil) n’est pas soumis aux mêmes contraintes légales et peut être librement convenu entre les parties.

 

La Cour de Cassation a considéré que la caution en application de la convention signée entre les parties, était fondée à invoquer le non respect du délai expressément prévu pour que sa garantie puisse être mobilisée.

 

C’est ainsi que la Haute Cour indique « attendu qu’en statuant ainsi » (en retenant la qualification le délai contenu au contrat de délai de prescription) alors que la caution était fondée en application de la convention des parties à invoquer le non-respect du délai expressément prévu pour la mise en jeu de son engagement, la cour d’appel a violé le texte susvisé «  (savoir l’article 1134 du Code Civil).

 

En conséquence, au regard de l’analyse dudit arrêt dont il est à regretter que la solution apportée par la Cour de Cassation ne soit pas plus détaillée permet de conclure que le délai prévu au contrat doit être qualifié de délai de forclusion et non de délai de prescription.

 

Etant ici rappelé que dans une affaire quasiment similaire, la Cour de Cassation par le passé a qualifié un délai contractuel de délai de forclusion et non de délai de prescription[1]

 

Geneviève FERRETTI

Vivaldi-Avocats


 

 [1] Cass.2eciv., 14 oct.1987, n° 86-13.059 P+B

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