Un poste en intérim très court peut-il constituer un poste de reclassement disponible pour un salarié déclaré inapte ?

Patricia VIANE CAUVAIN
Patricia VIANE CAUVAIN - Avocat

Les contrats de mise à disposition étant  conclus pour une durée très courte, le salarié ne peut soutenir qu’un tel poste de reclassement aurait dû lui être proposé

Source : Conseil d’ETAT 4e 1ère Chambres réunies 19 juillet 2022 N°438076

En l’espèce, un salarié protégé déclaré inapte à son poste conteste la décision de l’administration d’autoriser son licenciement.

Il considère que l’employeur aurait dû avant de solliciter l’autorisation de le licencier, chercher à le reclasser en lui proposant un poste intérimaire .

Son argumentation ne convainc ni l’Inspectrice du Travail, ni le ministre saisi sur recours hiérarchique pas plus que le Tribunal Administratif et la Cour administrative d’Appel.

Saisi le Conseil d’Etat  rejette le pourvoi et rappelle qu’il appartient à l’administration de s’assurer que l’employeur a conformément aux dispositions de l’article L 1226-10 du Code du Travail cherché à reclasser le salarié sur d’autres postes appropriés à ses capacités.

Il affirme clairement que lorsque l’employeur recourt au travail temporaire, dans des conditions telles qu’elles révèlent l’existence de postes disponibles au sein de l’entreprise, il lui appartient de proposer ces postes au salarié :

  • Dès lors que ceux -ci correspondent aux capacités du salarié
  • Peu important qu’il s’agisse de contrats à durée déterminée ou déterminée

Il relève néanmoins que la Cour d’Appel qui a constaté que les contrats de mise à disposition étaient d’une durée de deux à trois jours , pouvait décider que ces postes n’avaient pas à être proposés au salarié.

Avant d’envisager le licenciement d’un salarié inapte, l’employeur est tenu de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, tenant compte des recommandations du médecin du travail et aussi comparable que possible à son emploi précédent, au besoin par la mise en œuvre de mesures de mutation, d’aménagements, adaptations ou de transformations de postes existants ou d’aménagement du temps de travail.

Il peut être exonéré de cette obligation lorsque le médecin du Travail a indiqué dans l’avis d’inaptitude physique que le maintien du salarié dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé ou que son état de santé fait obstacle à tout reclassement.

C’est la première fois à notre connaissance que la question d’un reclassement portant sur un poste de très courte durée est posée au Conseil d’Etat qui s’est déjà prononcé sur la nécessité pour l’employeur de proposer des postes disponibles même de courte durée.

La Cour de Cassation a pris à plusieurs reprises position sur la nécessité pour les employeurs (il s’agit alors de salariés non protégés) de proposer dans le cadre de leur obligation de reclassement des postes disponibles même en CDD  et de courte durée.

Il est vraisemblable toutefois que saisie de la même problématique que le Conseil d’Etat, elle décide qu’un poste d’une journée ou deux n’a pas à être proposé au salarié.

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