Obligation de Conseil du Maitre d’œuvre

Kathia BEULQUE
Kathia BEULQUE - Avocat associée

Source : Cass.3ème Civ., 8 décembre 2021, n°20-20.086

 

C’est ce que précise la 3e chambre civile de la Cour de Cassation dans cette décision, inédite, comme suit :

 

« …

 

Faits et procédure

 

1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 22 janvier 2020), le 1er mars 2011, M. [R] et Mme [V] ont confié à la société Agence [T] [M], assurée auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF), une mission de maîtrise d’oeuvre complète portant sur la construction d’une maison et d’une piscine.

 

2. La société Les Entrepreneurs du bâtiment (société LEDB) a été chargée des travaux, la date d’achèvement étant fixée au 27 février 2013.

 

3. Le chantier a été abandonné par l’entreprise le 15 novembre 2012 et celle-ci a été mise en liquidation judiciaire le 17 septembre 2013.

 

4. Le 12 juillet 2013, M. [R] et Mme [V] ont conclu un contrat de construction de maison individuelle sans fourniture du plan avec la société Baxter & Partners, celle-ci s’engageant à fournir une attestation de livraison à prix et délai convenus au plus tard à la date d’ouverture du chantier, le début des travaux étant fixé au 12 septembre 2013.

 

5. Par lettre du 13 septembre 2013, la société Agence [T] [M] a résilié son contrat en invoquant la perte de confiance manifestée par les maîtres de l’ouvrage.

 

6. La société Baxter & Partners, désormais en liquidation judiciaire, qui n’a pas fourni de garantie de livraison, a abandonné le chantier.

 

7. Invoquant les fautes de la société de maîtrise d’oeuvre prises, d’une part, de l’absence de conclusion d’un contrat de construction de maison individuelle avec la société LEDB et, d’autre part, du commencement des travaux par la société Baxter & Partners sans qu’ait été fournie la garantie de livraison, M. [R] et Mme [V] ont assigné en réparation M. [M], pris en sa qualité de liquidateur amiable de la société Agence [T] [M], puis, celle-ci ayant été radiée du registre du commerce et des sociétés, M. [F], pris en sa qualité de mandataire ad hoc, ainsi que la MAF.

 

Examen des moyens

 

(…)

 

Réponse de la Cour

 

Vu les articles 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et L. 232-1 du code de la construction et de l’habitation :

 

10. Selon le premier de ces textes, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages-intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.

 

11. Selon le second, le contrat de louage d’ouvrage n’entrant pas dans le champ d’application de l’article L. 231-1 du code de la construction et de l’habitation et ayant au moins pour objet l’exécution des travaux de gros oeuvre, de mise hors d’eau et hors d’air d’un immeuble à usage d’habitation ou d’un immeuble à usage professionnel et d’habitation, ne comportant pas plus de deux logements destinés au même maître de l’ouvrage, dénommé contrat de construction de maison individuelle sans fourniture du plan, est soumis, à peine de nullité, aux prescriptions d’ordre public édictées par les articles L. 232-1 et L. 232-2 du code de la construction et de l’habitation, au titre desquelles figure la délivrance d’une garantie de livraison au bénéfice du maître de l’ouvrage.

 

12. Pour rejeter les demandes des maîtres de l’ouvrage tendant à voir déclarer la société Agence [T] [M] responsable de l’absence d’achèvement de leur maison à la suite du devis signé avec la société LEDB, l’arrêt retient que les premiers, informés dès le mois d’avril 2012 de l’existence d’un contrat de construction de maison individuelle, ont librement et en toute connaissance de cause écarté ce contrat et choisi de signer avec l’entreprise un contrat de louage d’ouvrage de droit commun, de sorte qu’ils ne sauraient en faire le reproche à la société de maîtrise d’oeuvre.

 

13. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les maîtres de l’ouvrage avaient été préalablement informés par la société de maîtrise d’oeuvre, en sa qualité de professionnelle de la construction, des protections et garanties d’ordre public offertes par le contrat de construction de maison individuelle sans fourniture du plan au regard du contrat de louage d’ouvrage de droit commun, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision…. »

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