Marée verte : la responsabilité de l’Etat est retenue.

Sylvain VERBRUGGHE
Sylvain VERBRUGGHE

 

 

SOURCE : CAA Nantes, 5ème ch., 21 juillet 2014

 

Le 28 juillet 2009, sur un secteur de l’embouchure du Roscoat en baie de Saint-Michel-en-Grève (Cotes d’Armor), un cheval tombe jusqu’à l’encolure dans une vasière est meurt instantanément. Son propriétaire, qui le tenait alors par la bride, perd connaissance mais a pu être secouru.

 

Le propriétaire du cheval impute la mort à la présence d’algues vertes et recherche la responsabilité de l’Etat pour faute, au titre notamment de l’absence de transposition, dans les délais, des directives du 16 juin 1975 et n° 91/676/CEE du 12 décembre 1991 concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles, à l’origine de la prolifération de cette algue toxique.

 

Sa demande d’indemnisation a été rejetée par le Préfet, dont la décision est confirmée par le Tribunal administratif de Rennes.

 

La Cour administrative d’appel de Nantes n’est pas du même avis, et retient la responsabilité de l’Etat, par une recherche de la faute de l’Etat, du préjudice de la victime, et du lien de causalité.

 

La faute

 

La Cour relève en effet :

 

– la carence de l’Etat à transposer lesdites directives relatives à la protection des eaux contre les pollutions d’origine agricole, ce qui aurait favorisé le développement des algues vertes ;

 

– l’inapplication de la législation relative aux installations classées pour la protection de l’environnement ;

 

– la régularisation massive, sans fondement légal, des exploitations agricoles existantes ;

 

– l’insuffisance des contrôles ;

 

– L’inefficacité des politiques de lutte contre les marées vertes ;

 

Et retient que ces carences sont constitutives d’une faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat.

 

Le lien de causalité

 

La Cour retient qu’au vu des connaissances scientifiques actuelles, il est établi que la décomposition de masses importantes d’ulves (algues vertes) est à l’origine d’émissions d’ammoniac ainsi que de sulfure d’hydrogène et que, à des concentrations importantes, l’inhalation du sulfure d’hydrogène, qui est un gaz très toxique, peut avoir des effets mortels.

 

Or il ressort du rapport d’autopsie que la mort de l’animal, survenue quasi-instantanément, n’est ni imputable à la noyade, ni au titre d’un quelconque traumatisme, mais par congestion pulmonaire intense, aigüe et généralisée, par inhalation d’un gaz toxique, dont l’émanation peut provenir du percement de la croûte superficielle recouvrant une vasière d’ulves en putréfaction.

 

Pour les juges du fond, il existe un lien direct de causalité entre les fautes commises par l’Etat et la mort du cheval.

 

Le préjudice

 

Il est constitué de l’unique perte du cheval, des frais engagés au titre de la perte de l’animal et du préjudice moral du propriétaire.

 

Toutefois, la Cour relève l’imprudence du cavalier, qui s’est engagé dans une zone en connaissance de sa dangerosité, notamment signalée par différents panneaux. L’Etat est donc condamné à indemniser le tiers du préjudice subi par le propriétaire du cheval.

 

Sylvain VERBRUGGHE

Vivaldi-Avocats

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