Le sort des hypothèques inscrites sur un bien indivis contre un seul indivisaire

Geneviève FERRETTI
Geneviève FERRETTI

 

 

SOURCE : Cass.1re civ., 10 juillet 2013, Pourvoi n°Z 12-20.885. Arrêt n° 915 F-P+B

 

Lorsque des hypothèques sont prises sur la totalité d’un bien indivis, en garantie d’une dette d’un seul indivisaire, les droits des créanciers hypothécaires sont subordonnés au sort du bien.

 

Les hypothèques ne conservent leurs effets que si le bien indivis est attribué au coindivisaire contre qui les suretés ont été prises.

 

Ce principe a été posé par la Cour de Cassation dans un arrêt rendu le 10 juillet 2013, ci-après commenté.

 

Préalablement à cette étude et pour une meilleure compréhension, il échet de rappeler les dispositions des articles 952 et 2114 du Code Civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 23 mars 2006, applicable en la cause.

 

Selon l’article 952 du code précité, l’effet du droit de retour sera de résoudre toutes les aliénations des biens donnés et de faire revenir ces biens au donateur, francs et quittes de toutes charges et hypothèques, sauf, dans les cas qu’il prévoit, l’hypothèque de la dot et des conventions matrimoniales.

 

Selon l’article 2114 du Code précité, l’hypothèque étant indivisible, la division de l’immeuble n’est pas susceptible d’entraîner la division de l’hypothèque.

 

Ces précisions apportées, seront à présent rappelés les faits.

 

Par acte contenant une clause de retour en cas de prédécès de la donataire, un couple fait donation à leur fille (ci-après dénommé « donataire ») d’un terrain.

 

Un jugement du 21 mars 2001 prononce la liquidation judiciaire de la donataire et un liquidateur est désigné.

 

La donataire décède en mars 2002, après son père, mais avant sa mère décédée en janvier 2003, laissant pour recueillir sa succession son autre fille (sœur de la donataire).

 

L’immeuble donné sur lequel avait été construit une maison d’habitation a été vendu par le liquidateur, et le prix de vente a été distribué entre les créanciers et plus précisément à la Banque qui avait fait inscrire des hypothèques judiciaires en garantie des condamnations prononcées contre les donateurs.

 

Par jugement du 12 juin 2008, a été :

       constatée la résolution de la donation consentie par sa mère à la donataire,

       ordonnée la restitution à la fille survivante des droits indivis correspondant à la moitié du terrain,

       constatée la nullité de la vente,

       condamné le liquidateur à restituer le prix à l’acquéreur.

 

Le liquidateur a alors assigné les créanciers et notamment la banque en restitution des sommes distribuées.

 

La Cour d’Appel a rejeté les demande du liquidateur, aux motifs :

  • qu’il résulte du jugement du 12 juin 2008 que la moitié indivise donnée par la mère lui été revenue au décès de sa fille, la donation étant résolue par l’effet de l’article 952 du code civil ;

 

  • la moitié donnée par le père à sa fille fait partie de la succession de cette dernière ;

 

  • d’en conclure que le bien était en indivision depuis le décès du père entre la donataire et sa mère ;

 

  • que l’article 815-17 du Code Civil, interdisant aux créanciers d’un indivisaire la saisie de la part de leur débiteur, sans leur interdire pour autant de prendre une sûreté sur cette part ;

 

  • qu’enfin le sort actuel de l’immeuble n’est pas précisé de sorte que les créanciers étaient bien des créanciers hypothécaires et que c’est à bon droit qu’ils ont été payés.

 

 

Sur le pourvoi formé par le liquidateur, ce dernier soutient que l’hypothèque prise sur le bien indivis par un indivisaire ne conserve son effet que si le bien est attribué, après partage, à cet indivisaire.

 

Or, il ne saurait être contesté que ce bien n’a jamais été attribué à la donataire, puisqu’il n’y a jamais eu de partage.

 

La Cour de Cassation censure la Cour d’Appel en relevant qu’alors que cette dernière avait retenu que par l’effet du droit de retour que s’étaient réservés les donateurs, le bien litigieux était devenu indivis entre l’un de ceux-ci, puis sa succession, et la succession de la donataire, elle se devait en conséquence en déduire que les droits des créanciers hypothécaires inscrits du chef de cette dernière étaient subordonnées au sort du bien dans le partage

 

Au travers de cette jurisprudence, il en résulte que les droits des créanciers hypothécaires sont subordonnés au partage

 

 

Geneviève FERRETTI

Vivaldi Avocats

 

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