La notion d’entreprise liée, pour l’appréciation de la qualité de PME européenne, est d’interprétation littérale

Clara DUBRULLE
Clara DUBRULLE

 

SOURCE : Com. 8 nov. 2017, FS-P+B, n° 16-14.302

 

Aux termes de l’article 885-0 V bis du Code général des impôts, les redevables de l’ISF peuvent réduire le montant de leur impôt s’ils investissent dans les petites et moyennes entreprises (PME) remplissant certaines conditions.

 

En l’espèce, les contribuables (un couple) ont souscrit à trois augmentations de capital de la société CLAMAX, laquelle détient des participations dans les sociétés AUDIS DISROCH, SODISROY et GDANKDIS. Ils ont considéré que ces opérations ouvraient droit au mécanisme de réduction d’ISF pour investissement dans les PME.

 

L’administration fiscale notifie aux contribuables une proposition de rectification remettant en cause les réductions d’impôt au motif que la société CLAMAX était une entreprise liée aux sociétés AUDIS DISROCH, SODISROY et GDANKDIS, et donc qu’elle ne constituait pas une PME au sens de l’article 885-0 V bis du CGI.

 

Pour rappel, parmi les conditions posées par l’article 885-0 V bis du CGI afin de bénéficier de la réduction ISF-PME, la société bénéficiaire doit répondre à la définition européenne des PME c’est-à-dire :

 

– Avoir un effectif strictement inférieur à 250 personnes ;

 

– Avoir, soit un chiffre d’affaires annuel n’excédant pas 50 millions d’euros, soit un total bilan annuel n’excédant pas 43 millions d’euros.

 

Pour bénéficier de la réduction ISF-PME, il convient donc de vérifier que l’entreprise bénéficiaire de l’investissement du contribuable respecte ces seuils. Le Bofip prend soin de préciser les méthodes de calcul des données à appliquer selon que l’entreprise bénéficiaire est une entreprise autonome, une entreprise partenaire ou une entreprise liées.

 

Aux termes de l’article 3, alinéa 3, de l’annexe I du règlement n° 800/2008 :

 

« Sont des « entreprises liées » les entreprises qui entretiennent entre elles l’une ou l’autre des relations suivantes :

 

a. une entreprise a la majorité des droits de vote des actionnaires ou associés d’une autre entreprise ;

 

b. une entreprise a le droit de nommer ou de révoquer la majorité des membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance d’une autre entreprise ;

 

c. une entreprise a le droit d’exercer une influence dominante sur une autre entreprise en vertu d’un contrat conclu avec celle-ci ou en vertu d’une clause contenue dans les statuts de celle-ci ;

 

d. une entreprise actionnaire ou associée d’une autre entreprise contrôle seule, en vertu d’un accord conclu avec d’autres actionnaires ou associés de cette autre entreprise, la majorité des droits de vote des actionnaires ou associés de celle-ci. »

 

Pour les entreprises liées, il convient d’ajouter aux données propres de l’entreprise l’intégralité des données des entreprises qui lui sont liées.

 

Dans la situation présentée à la Cour, l’administration fiscale estime que la société CLAMAX et ses filiales sont des entreprises liées, elle additionne donc l’ensemble des données. Les seuils définissant la PME étant dépassés, les contribuables se voient refuser le bénéfice de la réduction ISF-PME.

 

La question est donc de savoir s’il s’agit dans les faits d’entreprises liées.

 

En l’espèce, l’instruction révèle que :

 

– Si la société CLAMAX détient 99,99 % des sociétés AUDIS DISROCK et SODISROY, les statuts de ces deux sociétés prévoient que la révocation du directeur général est décidée à la majorité des associés, chaque associé détenant une voix. En outre, certaines décisions extraordinaires, doivent être prises à la majorité des deux tiers (chaque associé bénéficiant d’une voix) ou à l’unanimité des actionnaires.

 

– Si la société CLAMAX détient 99,5 % de la société GDANKDIS, les statuts de cette société prévoient que les décisions importantes doivent être adoptées à l’unanimité des actionnaires.

 

En conséquence, les décisions majeures et déterminantes au sein de ces sociétés ne peuvent être adoptées par la société CLAMAX seule.

 

La Cour d’appel de Poitiers déduit de l’ensemble de ces éléments que la société CLAMAX ne pouvant pas exercer une influence déterminante sur les sociétés AUDIS DISROCH, SODISROY et GDANKDIS, ni nommer ou révoquer les organes de direction, elle ne peut être considérée comme liée à ces sociétés au sens de l’article 3 de l’annexe I du règlement n° 70/2001.

 

Ce raisonnement n’est pas suivi par la Cour de cassation, laquelle retient une application littérale des textes. Elle juge que sont des entreprises liées les entreprises dont l’une à la majorité des droits de vote d’une autre.

 

Finalement, peu importe que les statuts empêchent la société mère de prendre seule des décisions, la simple détention de la majorité des droits de vote suffit pour qualifier des entreprises d’entreprises liées.

 

Clara DUBRULLE

Vivaldi-Avocats

 

 

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