Garantie décennale et imputabilité des désordres

Kathia BEULQUE
Kathia BEULQUE - Avocat associée

 

SOURCE : Cass.3ème Civ., 20 mai 2015 n°14-15.480

C’est cette condition de l’imputabilité, que la Troisième Chambre Civile de la Cour de Cassation, rappelle au bon souvenir du maître d’ouvrage et applique à un vendeur d’immeuble réputé constructeur, dans cette décision, inédite, comme suit :

 

« …

 

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Rennes, 30 janvier 2014), que Mme X… a vendu à Mme Y… un immeuble qu’il avait acquis de l’établissement national de la Poste, après y avoir réalisé des travaux pour l’aménager en habitation individuelle ; que, se plaignant de l’existence d‘infiltrations en toiture, Mme Y…a, après expertise, assigné M.X…en paiement de sommes ;

 

Sur le premier moyen :

 

Attendu que Mme Y… fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen, qu’aux termes de l’article 1792 du code civil, tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement le rendent impropre à sa destination ayant constaté que le vendeur avait acquis de l’établissement public national de la Poste un immeuble qu’il avait vendu à Mme Y… après y avoir réalisé des travaux de rénovation en vue de sa transformation en habitation individuelle, la cour d’appel a relevé que des infiltrations étaient apparues sur une partie de la toiture qui n’avait pas fait l’objet de travaux ; qu’elle devait rechercher si, en raison de ce vice spécifique affectant une partie préexistante de l’ouvrage, l’opération de rénovation de l’habitation n’avait pas manqué les objectifs poursuivis, de sorte que les désordres constatés sur la partie ancienne étaient couverts par la garantie décennale ; que partant, en s’abstenant de procéder à une telle recherche que ses propres constatations rendaient pourtant nécessaires, la cour d’appel a violé l’article 1792 du Code Civil ;

 

Mais attendu qu’ayant relevé que les infiltrations étaient apparues sur une partie de la toiture qui n’avait pas été l’objet de travaux, la cour d’appel, qui, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a pu en déduire que les dommages n’étaient pas imputables au vendeur réputé constructeur et ne pouvaient engager sa responsabilité décennale, a légalement justifié sa décision de ce chef ; … »

 

Un constructeur (en l’occurrence un vendeur d’immeuble réputé constructeur), sur qui pèse la présomption de responsabilité de plein droit de l’article 1792 du code civil, peut échapper à celle-ci, non seulement lorsqu’il apporte la preuve de l’existence d’une cause étrangère mais aussi s’il démontre que les désordres ne relèvent pas de sa sphère d’intervention.

 

Au cas d’espèce, les infiltrations étaient survenues sur une partie de la toiture sur laquelle le vendeur n’était pas intervenu.

 

La condition de l’imputabilité, rappelée régulièrement par la Cour de Cassation, n’était donc pas remplie.

 

Kathia BEULQUE

Vivaldi-Avocats

 

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