Dirigeant de société : exemple de faute détachable de ses fonctions, susceptible d’engager sa responsabilité personnelle.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

 

 

SOURCE : Cass com., 24 juin 2014, n° 13-50.050, Arrêt n° 613 F-Dn° 13-50.050, Arrêt n° 613 F-D

 

Un consultant ayant réalisé des prestations au profit d’une société, en exécution d’une lettre de mission signée le 06 octobre 2006, lui en réclama paiement par une assignation devant la Juridiction des Référés délivrée le 06 octobre 2007.

 

La société contestant l’authenticité de la signature du gérant sur ladite lettre de mission, déposait, la veille de l’audience de référé, une plainte simple pour faux en date du 07 novembre 2007, puis une plainte avec constitution de partie civile en date du 31 mars 2008.

 

Par suite, une Ordonnance des Référés du Tribunal de Commerce de PARIS rendue en date du 20 novembre 2007, considérait que la demande en paiement se heurtait à une contestation sérieuse au regard de la plainte pour faux déposée par la société.

 

Pourtant, par Jugement en date du 28 avril 2009, le Tribunal de Commerce de PARIS rejetait la demande de sursis à statuer présentée par la société en raison de l’information pénale en cours et, après avoir procédé à une vérification d’écritures, reconnaissait la validité de la signature sur la lettre de mission et renvoyait la société à conclure au fond sur la demande de paiement.

 

Un mois plus tard, par un Jugement du 26 mai 2009, le Tribunal de Commerce de PARIS ordonnait la liquidation judiciaire de la société, faisant remonter la date de cessation des paiements au 26 novembre 2007.

 

Le consultant déclarait au passif de sa créance, une somme de 669 522 €. Au rang chirographaire, cette somme n’avait aucune chance d’être payée dans le cadre de la procédure collective.

 

Par suite, le consultant faisait assigner le dirigeant de la société par-devant le Tribunal de Grande Instance de PARIS, afin d’obtenir sa condamnation sur le fondement de l’article 1382 du Code Civil, demandant l’indemnisation du préjudice résultant, pour lui, du caractère infondé et abusif des plaintes pénales déposées et de la faute délictuelle ainsi commise, de nature à engager la responsabilité personnelle du dirigeant de la société.

 

Le Tribunal de Grande Instance de PARIS, dans un Jugement du 24 novembre 2011, va accueillir la demande du consultant, mais limiter le montant des indemnisations à la somme de 150 000 €.

 

Le dirigeant de la société interjeta appel de cette décision, de sorte que les faits furent examinés par la Cour d’Appel de PARIS qui va considérer qu’il ne pouvait être déduit de l’ensemble des faits retenus par les premiers Juges, que la plainte déposée dans les intérêts de la société qui contestait être redevable des sommes réclamées, pouvait constituer une faute détachable de l’exercice des fonctions de dirigeant social ayant le caractère d’une faute lourde.

 

Par suite, le consultant se pourvoit en Cassation.

 

Bien lui en prit, car au visa de l’article L.225-251 du Code de Commerce, la Chambre Commerciale relevant que le signataire de la convention s’était abstenu de toute contestation de sa signature, le dirigeant qui la contestait néanmoins, avait, en déposant une plainte visant à faire obstacle au paiement de sommes dues par la société, commis une faute de nature à engager sa responsabilité vis-à-vis du créancier.

 

En outre, la Chambre Commerciale relève également le caractère infondé des plaintes, dans la mesure où un Jugement devenu irrévocable du Tribunal de Commerce avait reconnu que la signature apposée sur la convention litigieuse n’était pas un faux et qu’en outre le dirigeant s’était abstenu d’apporter toute précision sur le sort réservé à la plainte avec constitution de partie civile, de sorte que la Chambre Commerciale en conclut qu’il y avait véritablement une caractérisation de la faute séparable des fonctions de dirigeant.

 

Par suite, la Cour casse et annule, en toutes ses dispositions, l’Arrêt rendu par la Cour d’Appel de PARIS.

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

 

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