Source : Cass. com., 21 oct. 2020, n° 19-15.545, P+B
I – Les faits
Le propriétaire d’un ensemble immobilier, le donne en location à une SARL pour l’exploitation d’un fonds de commerce d’hôtel restaurant. Deux associés se sont constitués cautions solidaires de la SARL pour garantir le paiement des loyers. Le même jour, une banque consent à la SARL deux prêts garantis d’une part par les cautionnements solidaires des associés, et d’autre part par le cautionnement hypothécaire consenti par le propriétaire de l’ensemble immobilier.
Le tribunal de commerce prononce la liquidation judiciaire de la SARL, qui est étendue par la suite au propriétaire. La vente de l’ensemble immobilier permet l’apurement intégral du passif cumulé de la SARL et du propriétaire.
Par un jugement du tribunal de grande instance (devenu tribunal judiciaire) et par un arrêt de la cour d’appel un des associé est condamné à payer au liquidateur judiciaire une somme due au titre du cautionnement des loyers par cet associé ainsi qu’une autre somme due au titre du recours entre coobligés exercé au nom du propriétaire en raison de la créance de la banque.
Puis, le tribunal de commerce prononce la clôture pour extinction du passif de la liquidation judiciaire du propriétaire, qui fait pratiquer deux ans plus tard une saisie-attribution sur les comptes bancaires de l’associé et une saisie-vente-vente de l’un de ses véhicules. L’associé saisi demande vainement aux juges du fond de prononcer la nullité et la mainlevée de la saisie-attribution ainsi que la nullité des actes relatifs à la saisie-vente du véhicule automobile.
II – Le pourvoi
Devant la Cour de cassation, l’associé soutient que les mesures d’exécution ont été engagées par le propriétaire sur le fondement des décisions rendues au profit du liquidateur judiciaire et non au profit du propriétaire lui-même. Or l’article R. 121-1 alinéa 2 du code des procédures civiles d’exécution interdit au JEX de modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites et de suspendre l’exécution.
La Cour de cassation rejette le pourvoi et apporte une précision importante. Si le JEX ne peut, sous prétexte d’interpréter la décision dont l’exécution est poursuivie, en modifier les dispositions précises, il doit en fixer le sens et déterminer le bénéficiaire de la condamnation que cette décision a prononcée.
La jurisprudence admet que le JEX a le pouvoir, et même le devoir, d’interpréter le titre et d’en fixer le sens si nécessaire ou encore qu’il lui appartient de prendre les mesures propres à en assurer l’exécution effective[1].
Les condamnations ont été prononcées au profit du liquidateur à un moment où il agissait en cette qualité au nom et pour le compte du débiteur. Mais la procédure collective de ce dernier a été clôturée pour extinction du passif, la mission du liquidateur a pris fin ainsi que le dessaisissement du débiteur qui, redevenu in bonis, est en droit de faire exécuter les décisions que le liquidateur avait antérieurement obtenues en le représentant. Le bénéficiaire des condamnations prononcées reste toujours le même. Il agit directement sans être représenté.
On est finalement jamais mieux servis que par soi-même.
[1] Cass. 3e civ., 27 septembre 2007, n° 06-15.805 P