Source : Cass.2ème Civ., 16 décembre 2021, n°20-13.692
C’est ce que précise la Seconde chambre civile de la Cour de cassation dans cette décision, publiée au bulletin, comme suit :
« …
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 28 novembre 2019), à la suite d’un incendie survenu le 11 juin 2013 ayant endommagé un magasin dont elle était propriétaire, la société Ubaldi a conclu le 22 juillet 2013 avec son assureur, la société MMA IARD (l’assureur), un protocole d’accord pour l’indemnisation de ce sinistre.
2. Un désaccord étant toutefois survenu entre les parties concernant les modalités d’évaluation de certains dommages, l’assureur a été condamné à payer un solde d’indemnisation complémentaire à la société Ubaldi.
3.L’assureur a alors assigné, notamment, la société Robert Bosch dont la responsabilité était mise en cause dans le sinistre, afin d’obtenir sa condamnation à lui payer le montant de sommes réglées à la société Ubaldi et à le relever et garantir de toute condamnation susceptible d’être prononcée à son encontre au profit de son assurée.
Examen des moyens
Sur le deuxième moyen, ci-après annexé
4. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen, pris en ses première et troisième branches
Enoncé du moyen
5. L’assureur fait grief à l’arrêt de le déclarer valablement subrogé dans les droits et actions de la victime, la société Ubaldi, à concurrence de la somme de 2 610 902 euros seulement et de condamner en conséquence la société Robert Bosch à ne lui payer, compte tenu de sa responsabilité réduite à 50 %, que la somme de 1 305 451 euros, alors :
« 1°/ que l’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance est subrogé, jusqu’à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l’assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’assureur ; que le fait, pour l’assureur, de verser l’indemnité prévue par le contrat d’assurance en exécution d’une transaction conclue avec l’assuré sur l’évaluation de son dommage ne fait pas obstacle à la mise en oeuvre de la subrogation légale dont bénéficie l’assureur ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a jugé que la société MMA IARD n’était subrogée dans les droits de son assurée, la société Ubaldi, contre la société Robert Bosch, qu’à hauteur de la somme de 2 610 902 euros, en excluant des règlements pour un total de 2 528 753,88 euros au motif qu’ils avaient été effectués en exécution soit d’un protocole d’accord signé le 22 juillet 2013, soit de décisions de justice, et non dans le cadre du contrat d’assurance ; qu’en se prononçant ainsi, s’agissant de la somme de 500 000 euros versée en application du protocole d’accord, tandis que le seul fait pour l’assureur d’avoir conclu un tel accord avec son assuré, ne le privait pas de la possibilité d’invoquer le bénéfice de la subrogation légale, la cour d’appel a violé l’article L. 121-12 du code des assurances ;
3°/ que l’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance est subrogé, jusqu’à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l’assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’assureur ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a jugé que la société MMA IARD n’était subrogée dans les droits de son assurée, la société Ubaldi, contre la société Robert Bosch, qu’à hauteur de la somme de 2 610 902 euros, en excluant des règlements pour un total de 2 528 753,88 euros au motif qu’ils avaient été effectués en exécution soit d’un protocole d’accord signé le 22 juillet 2013, soit de décisions de justice, et non dans le cadre du contrat d’assurance ; qu’en se prononçant ainsi, s’agissant des sommes versées en exécution d’une décision de justice, tandis que l’assureur peut se prévaloir de la subrogation légale, qu’il verse volontairement à l’assuré l’indemnité d’assurance, ou qu’il y soit contraint par voie de justice, la cour d’appel a de nouveau violé l’article L. 121-12 du code des assurances. »
Réponse de la Cour
Vu l’article L. 121-12, alinéa 1er, du code des assurances :
6. Il résulte de ce texte, selon lequel l’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance est subrogé, jusqu’à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions des assurés contre les tiers qui par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’assureur, que la subrogation n’a lieu que lorsque l’indemnité a été versée en application des garanties souscrites. Il n’est en revanche pas distingué selon que l’assureur a payé l’indemnité de sa propre initiative, ou qu’il l’a payée en vertu d’un accord transactionnel ou en exécution d’une décision de justice.
7. L’arrêt, pour exclure du recours subrogatoire de l’assureur certaines indemnités payées par celui-ci, énonce qu’il ne démontre nullement que ces différents règlements sont intervenus en application des contrats d’assurance souscrits, puisqu’ils l’ont été, soit en vertu d’un protocole d’accord, soit en exécution de décisions de justice, et qu’ainsi il n’est pas fondé à se prévaloir de la subrogation légale.
8. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé.
(…)
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il déclare la société MMA IARD valablement subrogée dans les droits et actions de la société Ubaldi à concurrence de la seule somme de 2 610 902 euros et en ce qu’il condamne la société Robert Bosch, compte tenu de sa responsabilité réduite à 50 %, à payer à la société MMA IARD la seule somme de 1 305 451 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 9 mars 2018, l’arrêt rendu le 28 novembre 2019, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ;… »