SOURCE : 3ème civ, 24 janvier 2019, n°17-27106, Inédit
L’article R145-27 du Code de commerce oblige la partie sollicitant du juge des loyers commerciaux la fixation du loyer du bail renouvelé ou la révision du loyer à notifier préalablement à son cocontractant, à peine d’irrecevabilité de la saisine, un mémoire qui est interruptif de prescription biennal.
La délivrance du mémoire suppose cependant le respect de règles de forme, mais aussi de fond, parmi lesquels figure le pouvoir de délivrer le mémoire, étant précisé que contrairement au vice de forme, l’irrégularité de fond affecte la validité de l’acte indépendamment du préjudice qu’elle a pu causer au bénéficiaire.
Le mémoire affecté d’un vice de fond est nul, et n’est donc en principe pas interruptif de prescription. La nullité pourra toutefois être couverte par la notification d’un mémoire régulier, tant que le juge ou la cour d’appel ne statue pas sur la demande[1], conformément aux dispositions de l’article 121 du Code de procédure civile. Mais si une telle démarche permet de régulariser les modalités de saisine du juge, ses effets sur l’interruption de la prescription biennale ont fait l’objet de débats.
Dans l’affaire commentée, le mémoire préalable avait été délivré et la saisine de la juridiction opérée en 2011 au nom d’une partie seulement de l’indivision bailleresse, en violation des dispositions de l’article 815-3 al 4 du Code civil.
Une SCI était venue aux droits et obligations des indivisaires et avait notifié un mémoire après expertise en 2014.
Cependant pour la Cour d’appel de PAU, la régularisation de la procédure aurait du intervenir dans les deux ans de la délivrance des actes litigieux. Elle intervenait donc trop tard, entrainant la prescription de la demande.
La Cour de cassation ne partage pas cette position. Elle considère que :
« le délai de la prescription biennale avait été interrompu par la notification du mémoire, le 29 juin 2011, puis, par la délivrance de l’assignation, le 26 août 2011, et que, cette seconde interruption continuant à produire ses effets jusqu’à l’extinction de l’instance à laquelle la SCI Commarieu était partie, l’irrégularité de fond, affectant le mémoire préalable et l’assignation, avait été couverte avant qu’il soit statué sur la demande ».
Il en résulte que le mémoire, même affecté d’un vice de fond, interrompt toujours la prescription biennale et permet la saisine du juge des loyers, pour autant que l’irrégularité soit couverte avant que le juge statue.
[1] 3ème civ, 17 septembre 2008, n°07-16973 ; 3ème civ, 22 janvier 2013, n° 11-28184