Source : Cass.Com., 25 novembre 2020, n°19-11525, n°774 P
Une banque octroyant un prêt à une société obtient un cautionnement hypothécaire en garantie par une société tierce.
La société emprunteuse est mise en liquidation judiciaire. La banque fait alors délivrer un commandement laissant le choix à la société emprunteuse de délaisser l’immeuble ou de payer le solde de l’emprunt contracté.
Une procédure de vente forcée est alors initiée par la banque.
Cependant, la société garante est dans l’intervalle placée en redressement judiciaire et sollicitera le bénéfice de l’arrêt de la procédure de saisie en vertu des dispositions de l’article L620-40 du Code de commerce :
« I. – Le jugement d’ouverture suspend ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance a son origine antérieurement audit jugement et tendant :
1° A la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent ;
2° A la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.
II. – Il arrête ou interdit également toute voie d’exécution de la part de ces créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles.
III. – Les délais impartis à peine de déchéance ou de résolution des droits sont en conséquence suspendus. »
La Cour d’appel approuvera ce raisonnement en précisant que la procédure de saisie immobilière à l’encontre de la société tierce est soumise à l’arrêt des poursuites et précisera :
« la procédure de saisie immobilière engagée par la banque à l’encontre de la société Faukura, qui avait hypothéqué son immeuble en garantie de la dette d’un tiers, était soumise à la règle de l’arrêt des voies d’exécution au motif que la banque était créancière de la société Faukura et que sa « créance » était antérieure à l’ouverture de la procédure de cette société »
Et la Cour de cassation de répondre :
« 9. En statuant ainsi, alors que, la banque, n’ayant pas la qualité de créancier de la société Faukura mise en redressement judiciaire, n’était pas soumise à la règle de l’arrêt des voies d’exécution résultant de l’ouverture de cette procédure collective, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il constate l’arrêt de la procédure de saisie immobilière dirigée par la Banque de Polynésie contre la société Faukura et rejette les demandes de la Banque de Polynésie tendant à la validation de la surenchère et à la poursuite de la procédure, l’arrêt rendu le 23 novembre 2017, entre les parties, par la cour d’appel »
Depuis une décision d’une chambre mixte de la Cour de cassation, le cautionnement réel est analysé comme une sûreté réelle consentie pour garantir la dette d’un tiers n’impliquant aucun engagement personnel à satisfaire à l’obligation d’autrui. Il ne constitue pas un cautionnement (Cass. com., chambre Mixte, 2 déc. 2005, n° 03-18.201 n° 235 P). Le présent arrêt reprend cette analyse.
La banque bénéficiaire de la sûreté ne peut pas agir en paiement contre le constituant qui n’est pas son débiteur. En conséquence, comme elle n’a pas acquis la qualité de créancier du constituant, elle n’est pas soumise à l’arrêt ou l’interdiction des voies d’exécution résultant de l’ouverture de la procédure collective de ce dernier. Elle peut poursuivre ou engager une procédure de saisie immobilière contre le constituant après avoir mis en cause l’administrateur et le représentant des créanciers.