Point de départ du délai de prescription a l’encontre de l’assureur dommages/ouvrages en présence de désordres survenus avant réception

Equipe VIVALDI
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Source : Cass. Civ. 3, 13 février 2020, n° 1912281, FSPBRI

 

Dans cette affaire, deux époux ont procédé à la régularisation d’un contrat de construction de maison individuelle avec la Société CASM qui a délivré aux acquéreurs une garantie de livraison.

 

En outre, une assurance dommages-ouvrage était souscrite auprès de la Société AVIVA.

 

Du fait de difficultés et de désordres survenus en cours de chantier, le constructeur a sollicité la désignation d’un Expert avant que la CAS% ne tombe en liquidation judiciaire par jugement en date du 24 juin 2008.

 

Postérieurement, les acquéreurs ont procédé à la régularisation d’une déclaration de sinistre auprès de leur assureur dommages-ouvrage en novembre 2008.

 

Une transaction est intervenue entre les acquéreurs et le garant de livraison qui a assigné en indemnisation l’assureur dommages-ouvrage ainsi que l’assureur du maître d’œuvre.

 

La Cour d’Appel a néanmoins déclaré l’action du garant de livraison à l’encontre de l’assureur dommages-ouvrage irrecevable du fait de sa prescription.

 

Le garant de livraison a dès lors formé un pourvoi en cassation en soutenant quavant réception, l’assureur dommages-ouvrage garantit le paiement des réparations nécessaires lorsque, après mise en demeure, l’entreprise n’exécute pas ses obligations, ou s’avère dans l’incapacité de les respecter à raison de l’ouverture d’une procédure collective, celle-ci emportant résiliation du contrat et que dans l’hypothèse où la garantie n’est due qu’à compter de cette dernière date, le délai de deux ans prévu à l’article L. 114-1 du code des assurances ne peut courir qu’à compter de cette date.

 

Or, dans les faits, en l’absence de réception, l’inexécution et la résiliation du contrat ne sont intervenues qu’à la date du 24 juin 2008, date de l’ouverture de la liquidation judiciaire de l’entrepreneur.

 

Dans ces conditions, et selon le garant de livraison, en fixant le point de départ du délai de deux ans à une date antérieure au 24 juin 2008, les juges du fond ont violé les articles L. 114-1 et L. 242-1 du code des assurances.

 

Par arrêt en date du 13 février 2020, la Cour de Cassation rappelle que si pour les désordres apparus après réception il est jugé que le point de départ du délai biennal est le jour où le Maître de l’ouvrage a eu connaissance des désordres, il en va différemment pour les désordres survenus avant réception dès lors que c’est seulement lorsque, après mise en demeure, l’entreprise n’exécute pas ses obligations et que le contrat est résilié que la garantie de l’assureur dommages-ouvrage peut être recherché pour les désordres de nature décennale.

 

Il est par ailleurs rappelé que la formalité de la mise en demeure n’est pas requise quand elle s’avère impossible ou inutile notamment en cas de cessation de l’activité de l’entreprise ou de liquidation judiciaire emportant en conséquence résiliation de contrat de louage d’ouvrage.

 

C’est donc bien cette circonstance qui constitue l’évènement donnant naissance à l’action au sens de l’article L 114-1 du Code des Assurances et donc partant, le point de départ du délai de prescription biennal.

 

La Haute Juridiction a donc censuré l’arrêt rendu par la Cour d’Appel qui de son côté soutenait que les maîtres d’ouvrage avaient eu connaissance des désordres en septembre 2006 et que ces derniers ont régularisé leur déclaration de sinistre auprès de l’assureur dommages/ouvrages plus de deux ans après la connaissance des désordres sans l’avoir mise en demeure d’exécuter ses obligations ni de résilier son marché.

 

Cet arrêt permet d’effectuer un rappel non négligeable pour les maîtres d’ouvrage qui ont la possibilité d’agir à l’encontre de l’assureur dommages-ouvrage pour des désordres survenus antérieurement aux opérations de réception et ce dans un délai de deux ans à compter de l’envoi de la mise en demeure au constructeur ou si cette mise en demeure reste vaine ou s’avère être impossible, à compter de la date de de la cessation de l’activité de l’entreprise ou la résiliation du marché du constructeur.

 

Marion MABRIEZ

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