Pas d’entraide familiale pour l’épouse d’un gérant titulaire d’un contrat de travail, pour les heures effectuées au-delà de la durée contractuellement prévue, fut-ce à titre bénévole

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

SOURCE : Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation du 26 mai 2021 n°20-85.118 (F-P cassation partielle)

 

Un contrôle a été diligenté par les services de l’URSSAF le 3 octobre 2017 au sein d’une boulangerie-pâtisserie, qui a permis d’établir que l’épouse du gérant était employée dans la boulangerie en vertu d’un contrat de travail prévoyant 30 heures hebdomadaires au titre desquelles les cotisations sociales étaient acquittées, mais que celle-ci travaillait en réalité du lundi au dimanche de 6h à 14h, soit 56 heures par semaine.

 

Par suite, son époux a été renvoyé devant le Tribunal Correctionnel du chef de travail dissimulé et a été déclaré coupable.

 

Toutefois, la Cour d’Appel d’Aix en Provence dans un arrêt du 30 juin 2020, va le relaxer, considérant que l’épouse si elle était bien salariée de son époux elle était aussi la « femme du boulanger », de sorte que son intervention au-delà des horaires stricts compris dans son contrat de travail, participait de l’intérêt de la bonne marche d’une petite entreprise familiale dans laquelle elle était également intéressée en sa qualité d’épouse, liée par une communauté de vie et d’intérêts avec le prévenu, de sorte que les horaires effectués au-delà de la durée contractuelle prévue par son contrat de travail, constituaient une entraide familiale telle que définie par la jurisprudence.

 

En suite de cette décision, l’URSSAF forme un pourvoi en cassation.

 

A l’appui de son pourvoi, elle reproche à l’arrêt d’appel d’avoir relaxé le prévenu au motif que l’entraide familiale ou amicale ne peut s’appliquer qu’à une personne qui prête son concours sans obligation contractuelle, de manière ponctuelle, occasionnelle et non durable, gratuitement et sans contrepartie de quelque nature que ce soit et en dehors de toute suggestion juridique envers la personne qui la sollicite.

 

L’URSSAF soulève également que le bénévolat doit être nécessairement exclu lorsque le poste occupé est indispensable au fonctionnement de l’entreprise et qu’en tout état de cause, les dispositions de l’article L8221-5 du Code du Travail ont été violées, dès lors que le gérant employait son épouse en qualité de Vendeuse selon un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel pour une durée de 30h/semaine alors qu’il reconnaissait lui-même que son épouse travaillait 8 heures par jour, tous les jours du lundi au dimanche dans sa boulangerie.

 

La Chambre Criminelle de la Haute Cour va accueillir les moyens soulevés par l’URSSAF

 

Soulignant tout d’abord que selon l’article L8221-5 du Code du Travail est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié, le fait pour tout employeur de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d’heures inférieur à celui réellement accompli, et soulignant que le statut de salarié en vertu d’un contrat de travail qui place l’intéressé dans un lien de subordination à l’égard de son employeur, exclut que puisse être reconnu la possibilité de poursuivre au titre de l’entraide familiale et sans que soient établies les déclarations correspondantes aux organismes sociaux, la même activité au-delà des heures contractuellement prévues, fut-ce de façon bénévole.

 

Par suite, elle casse et annule l’arrêt d’appel.

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