Les fonds intégrant des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance sont de plus en plus plébiscités par les sociétés de gestion, encouragés par la forte demande des investisseurs. Afin d’éviter la pratique du « greenwashing » mais également délivrer une information conforme, ce type de fonds est particulièrement encadré, notamment concernant leur dénomination. En effet, le nom d’un fonds permet de communiquer sur le contenu de celui-ci et constitue un outil publicitaire important, il convient donc d’empêcher des noms de fonds contenant des termes ESG ou relatifs à la durabilité qui seraient inexacts, pas clairs ou trompeurs. L’Autorité des Marchés Financiers (AMF) a décidé, le 17 décembre 2024, de suivre les orientations concernant les noms des fonds ESG à la suite des clarifications apportées par l’Autorité Européenne des Marchés Financiers (ESMA).
I – Clarifications publiées par l’ESMA
Le 14 mai 2024, l’ESMA publiait son rapport final[1] relatif aux noms des fonds qui utiliseraient des termes issus des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance ou à la durabilité. Elle complétait cette publication par une clarification publiée le 13 décembre 2024, demandée par les autorités de niveaux nationaux, concernant des questions d’applicabilité des orientations contenues dans le rapport final, ces orientations s’appliquant principalement aux OPCVM (Organismes de Placement Collectif en Valeurs Mobilières) et aux FIA (Fonds d’Investissements Alternatifs).
Ces clarifications sont les suivantes :
- Pour être considéré comme un investissement durable « de manière significative » (« meaningfully »), l’OPC doit être investi à un minimum de 50 % en investissements durables ;
- Les fonds dont la dénomination emprunte des termes issus de l’environnement, l’impact et la durabilité, peuvent investir dans des obligations vertes européenes ou d’autres obligations vertes si ces obligations financent effectivement des activités vertes ;
- Les armes controversées sont, en l’absence d’autre clarification réglementaire, celles définies par l’indicateur 14 du tableau 1 de l’annexe 1 du règlement 2022/1288, à savoir : les mines anti-personnel, les armes à sous-munitions, les armes chimiques et les armes biologiques.
II – L’adaptation de la position-recommandation DOC-2020-03 de l’AMF
Le 16 décembre 2024, l’AMF a annoncé l’adaptation de sa position recommandation DOC-2020-03 pour prendre en compte le rapport précité publié en mai 2024 ainsi que les clarifications de l’ESMA du 13 décembre 2024, cette position-recommandation étant relative aux informations à fournir par les placements collectifs intégrant des approches extra-financières.
Ces orientations s’appliquent depuis le 21 novembre 2024 pour les nouveaux fonds, les fonds préexistants ayant jusqu’au 21 mai 2025 pour s’y conformer.
Ainsi, les principales modifications sont les suivantes :
- Les orientations de l’ESMA remplacent les critères relatifs à la dénomination des fonds de la doctrine AMF ;
- Des mentions neutres et succinctes du respect des orientations de l’ESMA sont autorisées dans la section « Autre » du DIC ;
- Suppression des mentions relatives au Code de transparence et de la plupart des mentions concernant le Label ISR.
La position-recommandation précitée, publiée en mars 2020, a pour vocation la lutte contre le « greenwashing » en fixant des standards à respecter pour permettre aux placements collectifs de communiquer sur l’intégration de critères extra-financiers, dans leur dénomination, c’est le sujet de la présente, mais également au sein de la documentation commerciale et du Document d’Informations Clef (DIC ou KID en anglais) qui a remplacé le Document d’Informations Clef pour l’Investisseur (DICI).
Pour rappel, cette position-recommandation impose une proportionnalité entre l’information délivrée sur les critères extra-financiers et l’impact effectif de ces critères sur la gestion du fonds. Cette proportionnalité implique différents degrés de communication, chacun devant atteindre certains standards : dans la dénomination, centrale (dans le DIC, la documentation commerciale et le prospectus), réduite (mention concise dans le DIC et la documentation commerciale et proportionnée dans le prospectus) et limitée au prospectus.
III – En résumé et en pratique
Soit le placement collectif souhaite mentionner des critères extra-financiers dans sa dénomination, celui-ci doit alors respecter les orientations ESMA sur les noms de fonds intégrant des critères extra-financiers et présenter certaines informations exigées par ces mêmes orientations. Le placement pourra alors faire référence à des termes en lien avec les critères ESG et de durabilité dans sa dénomination.
Soit le placement collectif souhaite communiquer sur la prise en compte de critères extra-financiers dans sa documentation réglementaire et/ou commerciale :
- En cas d’approches fondées sur un engagement significatif dans la gestion, si le placement présente le minimum requis d’informations (exemple : définition d’objectifs mesurables significatifs, principales limites méthodologiques de l’approche…) alors il pourra faire référence à la prise en compte de critères extra-financiers dans sa documentation ;
- En cas d’approches fondées sur un engagement non-significatif, si le placement présente un minimum d’informations (exemple : définition d’objectifs mesurables, principales limites dans la prise en compte de critères extra-financiers…) alors il pourra faire référence à la prise en compte de critères extra-financiers dans son DIC de façon concise et succincte et dans sa documentation commerciale mais uniquement de façon concise ;
- En cas d’approches en-deçà des standards de communications centrales ou réduites, le placement peut communiquer de manière proportionnée sur les critères extra-financiers de son approche mais uniquement au sein de son prospectus.
[1] Final Report, Guidelines on funds’ names using ESG or sustainability-related terms, 14 mai 2024