Le fonds servant ne peut pas modifier à lui seul le tracé de la servitude de passage au motif que les conditions de l’article 701 du Code Civil sont réunies ; il lui faut soit l’accord du fonds dominant avant travaux, soit une autorisation judiciaire validant le nouveau tracé
Source : Cass.3ème Civ., 7 mai 2025, n°23-50.032
L’article 701 du Code Civil dispose :
« Le propriétaire du fonds débiteur de la servitude ne peut rien faire qui tende à en diminuer l’usage, ou à le rendre plus incommode.
Ainsi, il ne peut changer l’état des lieux, ni transporter l’exercice de la servitude dans un endroit différent de celui où elle a été primitivement assignée.
Mais cependant, si cette assignation primitive était devenue plus onéreuse au propriétaire du fonds assujetti, ou si elle l’empêchait d’y faire des réparations avantageuses, il pourrait offrir au propriétaire de l’autre fonds un endroit aussi commode pour l’exercice de ses droits, et celui-ci ne pourrait pas le refuser ».
La Cour nous rappelle que même si les conditions de l’article 701 du Code Civil sont remplies et sont donc susceptibles de justifier une demande de déplacement de l’assiette de la servitude de la part du fonds servant, il doit néanmoins recueillir un accord donné par le propriétaire du fonds dominant ou une autorisation judiciaire pour effectuer les travaux de déplacement de l’assiette de la servitude de passage.
Sans cela, le fonds dominant peut demander le rétablissement de l’assiette d’origine et l’arrêt d’appel a été, en l’espèce, cassé pour l’avoir refusé au motif que les conditions de l’article 701 du Code Civil étaient remplies, et qu’un accord entre les propriétaires des deux fonds n’était, dans ces conditions, pas nécessaire pour modifier le tracé :
«
Vu l’article 701, alinéa 3, du code civil :
6. Selon ce texte, si l’assignation primitive de la servitude devient plus onéreuse au propriétaire du fonds assujetti, ou si elle l’empêche d’y faire des réparations avantageuses, le propriétaire du fonds assujetti peut offrir au propriétaire de l’autre fonds un endroit aussi commode pour l’exercice de ses droits, et celui-ci ne peut pas le refuser.
7. Il est jugé que ces dispositions, de portée générale, n’exigent pas un accord du propriétaire du fonds dominant, la modification pouvant être autorisée par un juge (3e Civ., 18 mars 1987, pourvoi n° 85-16.-69, Bull. n° 57), mais que le propriétaire d’un fonds servant, qui modifie l’assiette primitive d’une servitude, sans l’accord préalable du propriétaire du fonds dominant ou autorisation judiciaire, ne peut invoquer l’article 701 du code civil (3e Civ., 8 juillet 2009, pourvoi n° 08-15.763, Bull. n° 177), à moins qu’il n’ait préalablement rétabli l’assiette d’origine de la servitude de passage (3e Civ., 18 janvier 2023, pourvoi n° 22-10.700, publié).
8. Pour rejeter les demandes de M. [H], l’arrêt retient que les dispositions de l’article 701, alinéa 3, du code civil permettent la modification de l’assiette d’une servitude, sans que soit exigé un accord entre les propriétaires concernés, dès lors que les conditions posées par ce texte sont réunies, comme en l’espèce, l’ancienne assiette de la servitude litigieuse empêchant M. et Mme [M] de faire des réparations avantageuses, et le nouveau passage présentant une commodité équivalente au précédent.
9. En statuant ainsi, sans constater un accord donné par le propriétaire du fonds dominant ou une autorisation judiciaire pour effectuer les travaux de déplacement de l’assiette de la servitude de passage dont elle reconnaissait l’existence, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé…. »