Marchés publics : Une méthode de notation différente de celle annoncée dans les documents de la consultation est-elle de nature à caractériser un vice de consentement ?

Johanna HENOCQ
Johanna HENOCQ

Source : CE, 28 juin 2019 n°420776

 

Les faits étaient les suivants :

 

La Communauté d’agglomération de la Riviera française (Alpes-Maritimes) avait lancé en 2014 une procédure d’appel d’offres ouvert en vue de la conclusion d’un marché de fourniture et de services à bons de commande portant sur la fourniture, la maintenance et le lavage des moyens de pré-collecte des déchets ménagers, lequel était divisé en six lots.

 

La société Plastic Omnium Systèmes Urbains s’était vue attribuer le lot n°3 « Fournitures des points d’apports volontaires. »

 

Par un jugement en date du 8 avril 2016, le tribunal administratif de Nice avait rejeté la requête présentée par le préfet des Alpes-Maritimes tendant à l’annulation de l’ensemble des lots, excepté le lot n°5.

 

Sur appel du préfet, la Cour administrative d’appel de Marseille avait, dans un arrêt en date du 19 mars 2018, annulé le jugement de première instance et, par suite, le marché public.

 

C’est dans ce contexte que la société Plastic Omnium avait formé un pourvoi devant le Conseil d’Etat.

 

Le problème juridique était le suivant :

 

La méthode de notation in fine utilisée par le pouvoir adjudicateur peut-elle différente de celle qui avait été annoncée dans les documents de la consultation ?

 

Pour répondre à cette question, le Conseil d’Etat rappelle dans un premier temps qu’il appartient au juge du contrat, saisi par le représentant de l’Etat, d’apprécier l’importance et les conséquences des vices entachant la validité du contrat.

 

Le juge du contrat doit alors prendre en considération la nature des vices puis décider de la poursuite du contrat ou inviter les parties à prendre des mesures de régularisation, sauf à résilier ou résoudre le contrat.

 

Dans un second temps, le Conseil d’Etat souligne qu’en présence d’irrégularités ne pouvant être couvertes par une mesure de régularisation et ne permettant pas la poursuite de l’exécution du contrat et après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l’intérêt général, le juge dispose de deux options :

 

–    Résiliation du contrat avec effet différé éventuel ;

 

–    Annulation totale ou partielle si et seulement si le contrat a un contenu illicite ou s’il se trouve entaché d’un vice de consentement ou de tout autre vice d’une particulière gravité que le juge se doit de relever d’office.

 

Dans l’espèce qui lui était soumise, le Conseil d’Etat indique que la circonstance que la Communauté d’agglomération ait mis en œuvre une méthode de notation différente de celle qui avait été annoncé dans les documents de la consultation n’est pas de nature à caractériser un vice de consentement.

 

C’est sur ce motif que la Haute juridiction, faisant droit au pourvoi formé par la société attributaire du lot n°3, a procédé à l’annulation de l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille en ce qu’elle avait jugé, pour annuler le marché, que la mise en œuvre d’une méthode de notation différente de celle indiquée dans les documents de la consultation entachait le contrat d’un vice de consentement dès lors que cette circonstance avait nécessairement eu une incidence sur le classement des offres.

 

Cette décision, conforme aux règles jurisprudentielles relatives à la résiliation et l’annulation des marchés publics, amène néanmoins à s’interroger sur la valeur juridique des documents de la consultation.

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