Loi Sapin 2 : quel impact pour les banques ?

Thomas LAILLER
Thomas LAILLER

 

Source : LOI n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (dite Sapin 2)

 

Il s’agit d’un texte « fourre-tout » intéressant autant le droit fiscal, le droit commercial, la propriété intellectuelle, que le droit public, les procédures collectives ou encore le droit des assurances. Quel impact aura la Loi Sapin 2 en droit bancaire ? Tour d’horizon des mesures phares.

 

I – La protection des consommateurs en matière financière

 

C’est le titre IV du projet de loi, qui prévoit notamment de réduire de douze à six mois la durée de validité du chèque, afin d’encourager l’utilisation de moyens de paiement alternatifs aux chèques, rapides, sécurisés et accessibles (cartes, virements, prélèvements, etc.) et de diminuer l’incertitude liée au délai d’encaissement du chèque[1]. Il prévoit également la transposition, par voie d’ordonnance, de deux directives 2014/92/UE du 23 juillet 2014 sur la comparabilité des frais liés aux comptes de paiement, le changement de compte de paiement et l’accès à un compte de paiement assorti de prestations de base et 2015/2366/UE du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur, dite DSP2 (directive sur les services de paiements 2, laquelle révise la directive 2007/64/CE du 13 novembre 2007, ou DSP1)[2].

 

La Loi Sapin 2 prévoit d’interdire la publicité par voie électronique à destination des particuliers portant sur certains contrats financiers hautement spéculatifs et risqués. Enfin, il offre la possibilité, pour les détenteurs de livrets de développement durable (ex-Codevi), d’en affecter une partie à l’économie sociale et solidaire[3].

 

II – La modernisation de la vie économique et financière

 

Le titre VII du projet de loi Sapin rassemble un ensemble de dispositions intéressant directement les établissements de crédit. Il prévoit ainsi de modifier la hiérarchie des créanciers des établissements de crédit en liquidation judiciaire, afin de faciliter leur renflouement, en créant une nouvelle catégorie de créanciers chirographaires[4].

 

Le Gouvernement envisage de transformer en filiale de la Banque de France l’Institut d’Émission des Départements d’Outre-Mer (IEDOM), qui agit pour le compte de la Banque de France dans les collectivités d’outre-mer dans lesquelles l’euro circule (Guadeloupe, Martinique, La Réunion, Mayotte, Guyane, Saint-Martin, Saint-Barthélemy, Saint-Pierre-et-Miquelon). L’objectif est de rendre l’IEDOM totalement indépendant de l’État afin de répondre aux recommandations de la Banque centrale européenne. Enfin, le projet Sapin prévoit d’élargir les modalités d’intervention des sociétés de crédit foncier, lesquelles ont vocation à refinancer les crédits immobiliers consentis par les banques[5].

 

III – Le renforcement des pouvoirs contraignants du Haut conseil de stabilité financière sur l’assurance-vie

 

La création du HCSF, en 2013, est directement liée aux conséquences politiques de la crise financière de 2008. Jusqu’à présent, ses pouvoirs contraignants couvraient principalement les risques émanant du système bancaire. La Loi Sapin 2 vise aujourd’hui à renforcer ces pouvoirs pour les étendre au secteur de l’assurance (sociétés d’assurance ou de réassurance, mutuelles et institutions de prévoyance

  

Modulation des règles de dotation et de reprise de la provision pour participation aux bénéfices afin de renforcer la résilience des entreprises d’assurance face à des variations importantes des taux d’intérêt ou de prix des actifs ;

Prise à titre conservatoire de plusieurs mesures macroprudentielles préventives lorsque cela est nécessaire pour préserver la stabilité du système financier ou prévenir des risques menaçant gravement la situation financière des organismes d’assurance ou d’une partie significative d’entre eux ;

Renforcement des pouvoirs de transmission au HCSF d’informations couvertes par le secret professionnel.

 

C’est un pan de la loi vivement critiqué, car il concerne avant tout l’assurance-vie, pour laquelle, concrètement, le HCSF pourra par exemple reporter ou limiter le rachat en cas de crise financière avérée du système financier français et pour une durée de 3 mois maximale, renouvelable. II pourra aussi limiter le rendement des fonds en euros, les assureurs n’auront plus la possibilité de piocher dans leur réserve de sécurité pour décupler la performance des fonds en euros de leurs contrats d’assurance-vie, ce qui aurait pour effet de fortement limiter la rémunération de ces derniers.

 

La Loi Sapin 2 viserait ainsi à préserver le secteur de l’assurance-vie, fragilisé par les taux historiquement bas induits par la politique monétaire actuelle de la Banque centrale européenne. Elle devrait également permettre de protéger les assureurs en cas de hausse inopinée des taux d’intérêt. En tous les cas, elle aura indéniablement des répercussions sur l’attractivité du « placement préféré des Français », qui ne cesse de décroitre…

 

Thomas LAILLER

Vivaldi-Avocats



[1] Art. 25 du projet de loi

[2] Art. 26 et 27 du projet de loi

[3] Art. 28 du projet de loi

[4] Art. 51 du projet de loi

[5] Art. 52 et 53 du projet de loi

 

 

 

 

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