Assignation de la caution en paiement malgré l’adoption d’un plan de sauvegarde

Etienne CHARBONNEL
Etienne CHARBONNEL - Avocat associé

 

 

Source : Cass. Com. 2 juin 2015, Pourvoi n°14-10.673 F-P+B

 

L’article L622-28 al. 2 du Code de Commerce énonce que « Le jugement d’ouverture suspend jusqu’au jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation toute action contre les personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie. Le tribunal peut ensuite leur accorder des délais ou un différé de paiement dans la limite de deux ans. »

 

L’alinéa 3 du même article peut paraître à certains égards contradictoires puisqu’il prévoit la faculté, pour le créancier, de prendre à l’égard de ces mêmes garants ou coobligés des mesures conservatoires. Or, certaines d’entres elles obligent, à peine de validité, d’assigner en paiement les personnes contre lesquelles sont prises les mesures conservatoires.

 

Tels sont précisément les faits de l’espèce : une société a bénéficié d’une procédure de sauvegarde, qui s’est achevée par l’adoption d’un plan de sauvegarde.

 

L’établissement bancaire créancier a déclaré sa créance au passif, et pris des mesures conservatoires à l’encontre des cautions, en l’espèce une hypothèque judiciaire provisoire.

 

En application des articles L511-4 et R511-7 du Code des procédures civiles d’exécution, qui pose, à peine de caducité de la mesure, l’obligation d’assigner le débiteur dans le délai du mois, la banque a poursuivi les cautions en paiement, et obtenu à leur encontre un titre exécutoire, en cours de période d’observation.

 

Les cautions ont formé un pourvoi contre la décision de la Cour d’Appel qui les a condamnées au paiement, et qui a fixé l’exigibilité progressive des sommes selon l’exigibilité à venir des dividendes du plan de sauvegarde.

 

Les demandeurs au pourvoi faisaient valoir que les garants et coobligés d’une société en sauvegarde peuvent se prévaloir des dispositions du plan de sauvegarde, sur le fondement de l’article L626-11, de sorte que selon leur argumentation, la banque ne pouvait ne les poursuivre qu’en cas d’inexécution du plan.

 

La Cour de Cassation rejette le pourvoi, rappelant que le titre exécutoire obtenu contre la caution ne pouvait être mis en œuvre tant que le débiteur principal respectait son plan, de sorte que la Cour d’Appel, en condamné les cautions au paiement de l’intégralité des sommes garanties, mais en différant l’exigibilité de celles-ci dans les conditions du plan, n’avait pas violé les textes invoqués.

 

Par cette décision, la Cour de Cassation valide la faculté pour un créancier de poursuivre les garants et coobligés, y compris en période d’observation. Seule l’exécution des titres obtenus sera différée jusqu’à la défaillance du débiteur principal… ou jusqu’à l’adoption du plan de redressement, qui à la différence du plan de sauvegarde, n’est pas opposable par la garants aux créanciers.

 

Etienne CHARBONNEL

Vivaldi-Avocats

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