Souscription d’un emprunt par plusieurs emprunteurs : comment apprécier l’existence d’un risque d’endettement excessif ?

Thomas LAILLER
Thomas LAILLER

 

Source : Cass. com., 4 mai 2017, n°16-12.316, F-P+B+I

 

I – En l’espèce

 

Une banque a consenti à deux époux des prêts destinés à financer la création d’une entreprise et l’acquisition du matériel utile à son démarrage. La société ayant été mise en redressement, puis liquidation judiciaires, la banque a assigné en paiement l’épouse qui a reconventionnellement recherché sa responsabilité pour manquement à son devoir de mise en garde, au motif qu’elle n’avait pas apprécié le risque d’endettement excessif au regard de ses revenus.

 

La Cour d’appel a confirmé le jugement, en retenant que la banque avait bien manqué à son devoir de mise en garde à l’égard de l’épouse emprunteuse. Celle-ci percevant un salaire mensuel de 1.500 €, et la charge d’emprunt du remboursement des prêts pesant plus de la moitié de ses revenus, son endettement était excessif.

 

II – L’arrêt de cassation

 

Saisie d’un pourvoi part la banque, la Cour de cassation a censuré l’arrêt d’appel au visa de l’article 1147 du Code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016. Pour la Haute juridiction, c’est bien l’ensemble des biens et revenus des co-emprunteurs lors de l’octroi des prêts qui doit être pris en compte, et non chaque co-emprunteur pris individuellement.

 

III – La portée de la décision

 

Par cette position de principe, la Haute juridiction préserve la sécurité juridique des contrats de prêt consentis à des co-emprunteurs. Les éventuelles conditions ultérieures de remboursement ne sont pas à prendre en compte par le banquier, au moment de l’octroi du crédit. C’est ici l’illustration d’une jurisprudence désormais classique[1], peu importe par ailleurs la qualification d’un bien au regard du régime matrimonial : les biens propres comme les biens communs doivent en conséquence être pris en considération[2]. !le devoir de mise en garde a quand même quelque limite, même au regard d’emprunteurs profanes.

 

Thomas LAILLER

Vivaldi-Avocats

 


[1] Cass. com., 9 févr. 2016, n°14-10.371, F-D

[2] Cass. civ 1ère, 10 sept.2015, n°14-18.851, F-P+B ; Cass. com. 8 mars 2017, n°14-29.766, F-D 

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