Sanction de l’erreur de déclaration de chantier du maître d’œuvre

Amandine Roglin
Amandine Roglin

La non-déclaration de chantier par le maître d’œuvre ne peut être sanctionnée que par une réduction proportionnelle d’indemnité, dont le mode de calcul ne peut être modifié contractuellement.

Source : Cass. 3e civ., 11 mai 2022, n° 21-15.420, FS-B

I –

En l’espèce, un couple missionne un architecte pour assurer la maitrise d’œuvre de leur chantier.

Des désordres surviennent et les maitres d’ouvrage assignent, après expertise judiciaire, le maître d’œuvre, son assureur et le constructeur.

Les maîtres d’ouvrage sont déboutés de leur demande de garantie dirigée contre l’assureur de maître d’œuvre au motif que celui-ci a commis une erreur en déclarant le chantier à son assureur. Celui-ci a en effet indiqué que la valeur d’un chantier était de 0,00 euros. Or cette erreur doit être analysée comme une absence totale de déclaration de chantier selon les juges du fond.

Le couple forme un pourvoi en cassation.

II –

La Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel en application des dispositions d’ordre public de l’article L.113-9 du Code des assurances dans la mesure où la police d’assurance du maître d’œuvre incluait une clause visant à sanctionner la déclaration inexacte par l’absence totale de garantie alors que « l’indemnité due par l’assureur doit être réduite en proportion du taux de la prime annuelle payée par rapport à celui de la prime qui aurait été due si la mission avait été déclarée.

Le contrat d’assurance ne peut déroger à ces dispositions d’ordre public en prévoyant un autre mode de calcul de la réduction proportionnelle.

Pour rejeter les demandes formées par les maîtres de l’ouvrage contre la MAF, l’arrêt retient que l’article 5.2 des clauses générales du contrat d’assurance et l’article L. 113-9 du code précité rattachent expressément l’obligation de déclaration à chaque mission et réduisent l’indemnité en proportion des cotisations payées pour la mission inexactement déclarée, l’absence de déclaration équivalant à une absence de garantie.

Il retient, ensuite, qu’une déclaration pour un montant égal à zéro équivaut à une absence de déclaration et justifie l’absence de garantie.

En statuant ainsi, alors que la réduction proportionnelle de l’indemnité due au tiers lésé ne pouvait se calculer d’après le rapport entre les cotisations payées pour la mission inexactement déclarée et les cotisations qui auraient dû être payées pour cette mission, la cour d’appel a violé le texte susvisé ».

III –

La Cour de cassation énonce que le contrat d’assurance ne peut pas déroger aux dispositions d’ordre public de l’article L. 113-9 du code des assurances en prévoyant un autre mode de calcul de la réduction proportionnelle. Sur ce point, elle semble s’écarter de sa jurisprudence antérieure. Elle avait, en effet, admis le principe selon lequel lorsque le contrat d’assurance de responsabilité professionnelle de l’architecte ne relevant pas de l’assurance obligatoire prévoit une clause faisant de la déclaration de chaque chantier une condition de la garantie, cette clause doit recevoir application, de sorte que l’absence de déclaration d’un chantier entraîne une non-assurance (Cass. 3e civ., 1er oct. 2020, n° 19-18.165), peu importe qu’elle soit en concurrence avec l’article L. 113-9 du code des assurances et qu’elle en contredise les dispositions d’ordre public (Cass. 3e civ., 1er oct. 2020, n° 18-20.809)

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