Congé : Condition d’application du préavis réduit.

Delphine VISSOL
Delphine VISSOL

 

Source : Cass. 3ème civ., 5 févr. 2014, n°13-10.804 – JurisData n°2014-001639.

  

Le propriétaire d’un logement donné à bail verbal à des époux a, à la suite de la libération des lieux, assigné ceux-ci en paiement de sommes dues au titre des réparations locatives.

 

Se prévalant notamment d’un délai de préavis réduit et de l’absence d’accord pour une révision du loyer, les locataires ont formé une demande reconventionnelle en remboursement de sommes.

 

Le bailleur fait en l’espèce grief à la Cour d’appel d’avoir accueilli cette demande reconventionnelle.

 

Rejetant le pourvoi, la Cour de cassation a considéré :

 

« Ayant relevé que le locataire avait perdu son emploi le 31 décembre 2008 puis retrouvé un nouvel emploi le 23 mars 2009, la cour d’appel en a déduit à bon droit que les locataires pouvaient, à l’occasion du congé délivré le 29 mai 2009, se prévaloir d’un délai de préavis réduit ».

 

Aux termes des dispositions de l’article 15 alinéa 2 de la Loi du 6 juillet 1989 : « Le délai de préavis applicable au congé est de trois mois lorsqu’il émane du locataire et de six mois lorsqu’il émane du bailleur. Toutefois, en cas d’obtention d’un premier emploi, de mutation, de perte d’emploi ou de nouvel emploi consécutif à une perte d’emploi, le locataire peut donner congé au bailleur avec un délai de préavis d’un mois. Le délai est également réduit à un mois en faveur des locataires âgés de plus de soixante ans dont l’état de santé justifie un changement de domicile ainsi que des bénéficiaires du revenu minimum d’insertion (…) ».

 

Il résulte de cette disposition que pour bénéficier d’un préavis réduit à un mois, le preneur ayant perdu puis retrouvé un emploi doit uniquement démontrer que ces deux évènements consécutifs sont survenus au cours de l’exécution du bail sans que la Loi ne lui impose un délai entre la survenance de ces deux évènements.

 

En revanche, le preneur se doit de demeurer vigilant quant au délai dans lequel il donne congé en suite de la survenance des ces évènements dès lors que la jurisprudence considère que le congé doit être donné dans un temps « assez proche » de la survenance du fait générateur. A défaut, le délai de préavis réduit ne saurait trouver application.

 

Sur le fond, cette position ne saurait être critiquée pour être conforme à l’esprit du texte dès lors que le préavis réduit est justifié par l’idée que le locataire doit pouvoir être rapidement mobile par rapport au lieu de son emploi ou par celle selon laquelle il doit pouvoir se libérer rapidement des charges d’un logement qu’il ne peut plus assurer, dans l’hypothèse d’une perte d’emploi.


En revanche, reste à déterminer le « délai raisonnable » dans lequel doit être donné le congé.

 

En l’espèce, un délai de deux mois s’étant écoulé entre l’obtention d’un nouvel emploi et le congé, la Cour de cassation a considéré que c’est à bon droit que la Cour d’appel a accepté d’appliquer un préavis réduit.

 

Aussi si les jurisprudences demeurent variantes selon les circonstances de fait, il sera pour exemple relevé que les Juridictions considèrent tardifs des congés donnés 4 mois après la survenance de l’évènement.

 

Il sera également rappelé, en marge de cette décision, que pour ouvrir droit à un préavis abrégé, la perte d’emploi doit être matérialisée au jour où le congé est donné, la seule crainte d’un licenciement[2] ou même sa perspective[3] n’autorisant pas un préavis réduit.

 

Le préavis réduit nécessite donc que le congé soit donné ni trop tôt …ni trop tard….

 

Delphine VISSOL

Vivaldi Avocats

 


[1] Jules JOUY.

[2] Cass. 3ème civ., 21 juill. 1999 :Loyers et copr. 2000. Comm.7, note B ; Vial-Pedroletti

[3] CA Paris, 6ème ch. C, 22 sept. 1998 : Juris Data n° 1998-022313

 

 

 

 

 

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