Une créance irrégulièrement déclarée entraine la sureté qui lui est attachée !

Jacques-Eric MARTINOT
Jacques-Eric MARTINOT - Avocat

 

Source : Cass.Com., 4 mai 2017, n°15-24854, n°663 P + B + I

 

I – Les faits.

 

Une société se voit consentir un prêt par un établissement bancaire qui sollicite en garantie un nantissement sur le fonds de commerce.

 

La société sera mise en sauvegarde et un plan sera arrêté par le Tribunal.

 

Le juge commissaire, par ordonnance devenue irrévocable, déclarera irrecevable la déclaration de créance faite par la Banque au motif que la déclaration a été faite par un préposé ne disposant pas d’un pouvoir régulier.

 

Le nantissement arrivant à expiration, la Banque a souhaité renouveler sa garantie.

 

Le débiteur sollicite du Tribunal la radiation de l’inscription. Rejet de la Cour d’appel au motif que « la déclaration de créance ayant été déclarée irrégulière, la créance n’est pas éteinte, mais seulement inopposable à la procédure »

 

II – Ce qu’il faut retenir.

 

La Cour de cassation n’entendra pas suivre le raisonnement de la Cour d’appel et rendra par conséquent un arrêt de rejet.

 

La cour précise « Qu’en statuant ainsi, alors que l’article L. 624-2 du code de commerce, qui prévoit que le juge-commissaire décide de l’admission ou du rejet des créances ou constate soit qu’une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence, ne distingue pas entre les différents motifs de rejet d’une créance déclarée, de sorte que la décision par laquelle le juge-commissaire retient qu’une créance a été irrégulièrement déclarée et ne peut être admise au passif est, au sens du texte précité, une décision de rejet de la créance, qui entraîne, par voie de conséquence, l’extinction de la sûreté qui la garantissait, la cour d’appel a violé le texte susvisé ; »

 

Afin de mieux comprendre la portée de l’arrêt, il est nécessaire de relire l’article L624-2 du Code de commerce qui précise :

 

« Au vu des propositions du mandataire judiciaire, le juge-commissaire décide de l’admission ou du rejet des créances ou constate soit qu’une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence. En l’absence de contestation sérieuse, le juge-commissaire a également compétence, dans les limites de la compétence matérielle de la juridiction qui l’a désigné, pour statuer sur tout moyen opposé à la demande d’admission. »

 

Autrement dit, la décision du Juge commissaire par laquelle il retient ou non une créance scelle également le sort de la garantie.

 

Ainsi, si le Juge commissaire précise qu’une créance irrégulièrement déclarée ne peut être admise au passif, alors la garantie qui lui est attachée doit voir constater son extinction.

 

Cet arrêt très instructif nous permet de distinguer les différents « qualificatifs » attachés aux créances en cas de procédure collective.

 

Les créances, à défaut d’être régulièrement ou irrégulièrement déclarée peuvent ne pas être déclarées ou en cas de déclaration, tout simplement rejetées.

 

Tout d’abord, la créance non déclarée ne sera plus frappée d’extinction si le relevé de forclusion n’a pas été obtenu, mais deviendra inopposable à la procédure collective. Le renouvellement de la garantie pourra, dans ce cas, toujours se faire.

 

Enfin, les créances définitivement rejetées ou irrecevables seront frappées elles aussi d’extinction tout comme la garantie l’affectant.

 

La prudence est de mise, la déclaration doit donc être faite soigneusement !

 

Jacques-Eric MARTINOT

Vivaldi Avocats

 

 

 

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