A quel moment le devoir d’information annuelle due à la caution par le créancier doit-il s’achever ?

Thomas Chinaglia

Est posé le principe selon lequel le devoir d’information annuelle due à la caution, personne physique, ne prend fin que lorsque s’éteint la dette garantie par le cautionnement.

Civ. 2ème, 30 avril 2025, n° 22-22.033

I –

Bien que rendu sous l’empire du droit antérieur à l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 réformant le droit des sûretés, l’arrêt peut être assez facilement transposé en droit nouveau. 

En l’espèce, est conclu un prêt par acte notarié en 2004. Deux personnes physiques s’engagent, en qualité de cautions, envers la banque prêteuse. L’emprunteur, devenant défaillant, les cautions se voient poursuivre par le créancier prêteur. Ce dernier ne parvint pas à obtenir, de manière amiable, le paiement de sa créance à l’égard de ces derniers. L’établissement bancaire décide donc d’utiliser l’exécution forcée.

En 2009, une exécution forcée est décidée sur certains immeubles des cautions. En 2021, ces dernières saisissent le tribunal judiciaire aux fins de voir constater la prescription et l’abandon de ladite procédure d’exécution forcée immobilière.

Une ordonnance les déboute en juillet 2021. Il est également jugé irrecevable, en outre, un second moyen soulevé par les garants tendant à faire déchoir la banque des intérêts, frais et pénalités dans ses rapports avec les cautions en raison d’un prétendu défaut d’information annuelle sur le fondement des dispositions du code de la consommation et de celles du code monétaire et financier.

Les cautions soutenaient que l’obligation d’information annuelle devait se poursuivre postérieurement au commandement de payer, et devait cesser au moment où l’obligation garantie s’éteignait.

La Cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu par les juges du fond qui avaient décidé que cette obligation cessait à compter du commandement de payer.

II –

Pour rappel, l’article 2302 du Code civil dispose :

« Le créancier professionnel est tenu, avant le 31 mars de chaque année et à ses frais, de faire connaître à toute caution personne physique le montant du principal de la dette, des intérêts et autres accessoires restant dus au 31 décembre de l’année précédente au titre de l’obligation garantie, sous peine de déchéance de la garantie des intérêts et pénalités échus depuis la date de la précédente information et jusqu’à celle de la communication de la nouvelle information. Dans les rapports entre le créancier et la caution, les paiements effectués par le débiteur pendant cette période sont imputés prioritairement sur le principal de la dette. […] »

La question était de savoir si cette obligation d’information annuelle devait se poursuivre alors qu’il avait été constaté que le débiteur principal était défaillant et qu’un commandement de payer a été délivré à la caution.

Le principe posé par la Cour de cassation est que l’obligation d’information annuelle de la caution doit se poursuivre jusqu’à l’extinction de la dette garantie par le cautionnement.

La défaillance du débiteur principal doit s’interpréter comme un argument supplémentaire à la sauvegarde de la protection de la caution et à sa parfaite information. La doctrine considérait déjà que l’obligation d’information annuelle de la caution devait se poursuivre par le créancier professionnel, jusqu’à l’extinction totale de la dette garantie, même si une mise en demeure ou des poursuites avaient été engagées par le créancier envers ladite caution.

Ainsi, le fait qu’un commandement de payer ait été délivré à la caution n’est pas de nature à exonérer le créancier professionnel de son obligation d’information annuelle à son égard, bien au contraire.

En l’absence d’exécution d’une telle obligation, notamment durant la poursuite de procédures d’exécution forcée, parfois assez longues, il n’est pas anormal de constater une évolution importante du montant de la dette garantie.

Ainsi, ce n’est pas parce que le débiteur devient défaillant que l’obligation d’information annuelle doit s’estomper. Au contraire, celle-ci trouve encore plus d’intérêt à être délivrée de manière continue. L’obligation d’information annuelle est donc due dès que le cautionnement est créé, jusqu’à l’extinction définitive et totale de la dette garantie.

Partager cet article