Dans un arrêt récent, la Cour de cassation opère un double rappel : d’une part, lorsqu’elle contrevient à une stipulation contractuelle, la résolution d’une assemblée générale peut être annulée lorsque la stipulation contractuelle violée constitue la retranscription d’une règle impérative du Code de commerce, d’autre part, la preuve de l’abus de majorité repose sur la partie qui l’invoque.

Source : Cass. com., 7 mai 2025, n°23-21.508, publié au bulletin

I –

Dans son arrêt en date du 7 mai 2025, la chambre commerciale de la Cour de cassation casse l’arrêt d’une cour d’appel qui annulait l’assemblée générale ordinaire des associés, et les procès-verbaux subséquents, d’une SARL basée en Polynésie française. L’assemblée générale annulée révoquait notamment le mandat social d’un des deux cogérants de la société.

II –

La cour d’appel considérait que la révocation d’un gérant ou cogérant de la société devait être décidée pour un juste motif rapporté au procès-verbal de l’assemblée générale, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.

Ce n’est pas la position suivie par la Cour de cassation qui rappelle que toute décision de la collectivité des associés en contradiction avec les statuts n’est pas susceptible de nullité. En effet, la nullité est encourue lorsque les stipulations des statuts violées par la décision des associés constituent une transcription d’une disposition impérative du livre II du Code de commerce.

Or, l’inscription du motif justifiant la révocation sur le procès-verbal n’est pas une règle impérative du livre II du Code de commerce : « aucune disposition impérative du livre II du code de commerce ne prévoit que le motif de révocation doit être rapporté au procès-verbal de l’assemblée générale révoquant le mandat du dirigeant social, la cour d’appel, qui n’a au demeurant pas constaté que la disposition statutaire prétendument méconnue procéderait de l’aménagement d’une faculté offerte par une disposition impérative de la loi, a violé le texte susvisé. »

L’arrêt réaffirme le principe posé par l’arrêt désormais bien connu Larzul I[1] : la violation d’une clause statutaire peut entraîner la nullité d’une décision prise par la collectivité des associés, dans le cas où la clause statutaire violée constitue la retranscription d’une règle impérative prévue par le Code de commerce.

III –

De plus, la Cour de cassation relève également une inversion de la charge de la preuve effectuée par la cour d’appel.

En effet, l’arrêt des juges du fond énonçait que la société ne produisait aucun élément permettant d’établir que la révocation de la cogérante était conforme à l’intérêt général de la société. Cependant, la Haute Juridiction rappelle qu’il revient à la partie qui invoque un abus de majorité d’en apporter la preuve. En l’espèce, la cogérante invoquait un abus de majorité dans la décision de révocation, il ne revenait donc pas à la société de prouver que cette décision avait été prise en accord avec son intérêt général.


[1] Cass. com., 15 mars 2023, no 21-18324

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