Prescription de l’action en nullité du jugement d’adjudication

Jacques-Eric MARTINOT
Jacques-Eric MARTINOT - Avocat

Source : Cass.Civ.2., 4 juin 2020, n°18-2293, n°530 P+B+I

 

Si le litige entre les parties se déroule avant la réforme de 2008, on pourra transcrire la solution à la règle applicable depuis 2008.

 

Une procédure de saisie immobilière est diligentée à l’encontre de deux époux coemprunteurs à l’appui d’actes authentiques.

 

L’audience d’adjudication a lieu le 24 mars 1993, et la société adjudicataire procédera par la suite à la revente des biens acquis par lots.

 

La difficulté nait 8 ans après. En effet, un arrêt de Cour d’appel statuant initialement sur les intérêts civils qualifiera le délit de faux en écriture authentique à l’encontre du Notaire.

 

Le Tribunal de première instance est alors saisi en vue de l’obtention de la nullité du jugement d’adjudication. Gain de cause en première instance, la prescription quinquennale de l’ancien article 1304 du Code civil n’est pas applicable.

 

Appel est alors interjeté et la décision querellée sera confirmée induisant la restitution des biens saisis.

 

Les acheteurs des biens vendus forment alors un pourvoi.

 

L’argumentation développée est la suivante. Les requérants estiment que la prescription quinquennale doit s’appliquer au motif que le jugement d’adjudication constitue un contrat judiciaire. Si tel est le cas, alors la prescription quinquennale doit s’appliquer.

 

La Cour a la lourde tâche de qualifier le jugement d’adjudication et par voie de conséquence l’application du régime de la prescription, quinquennale fondée sur l’ancien article 1304 du Code civil ou trentenaire en vertu de l’ancien article 2262 du même Code.

 

La Cour de cassation rejettera cette argumentation et précisera dans son attendu :

 

« Mais attendu que la prescription quinquennale édictée par l’article 1304 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n°2016-131 réformant le droit des obligations, applicable en Polynésie française, ne concernant que les actions en nullité d’une convention et l’action en nullité du jugement d’adjudication ne tendant pas à l’annulation d’une convention, c’est à bon droit, et sans méconnaître le principe de sécurité juridique, ni porter atteinte au droit au respect des biens, que la cour d’appel a décidé qu’en l’absence d’application de la loi n 2008-561 du 17 juin 2008 relative à la prescription et de l’ordonnance susmentionnée, la prescription trentenaire de l’article 2262 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008, était applicable ; »

 

De ce point de vue, l’arrêt ici présenté n’est qu’une confirmation de la jurisprudence en vigueur, avec cette précision dont on sait désormais que, dans les espèces soumises au droit antérieur à la réforme de 2008, la prescription est bien trentenaire et fondée sur l’ancien article 2262.

 

La réforme de 2008 fait désormais perdre tout intérêt à cette problématique puisque la prescription de droit commun est désormais de 5 ans.

 

L’arrêt aura pour autant eu le mérite de qualifier le jugement d’adjudication dont la nature demeure bien particulière.

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