La publication de liens hypertexte vers des œuvres protégées peut constituer une contrefaçon

Virginie PERDRIEUX
Virginie PERDRIEUX

  

SOURCE : Cour de justice de l’Union européenne, arrêt du 9 septembre 2016, C 160-15, aff. GS Media / Sanoma Media, Playboy et autre

 

Sur commande de la société Sanoma, éditeur du magazine Playboy, un photographe a réalisé des photographies qui devaient apparaître dans l’édition du mois de décembre 2011 du magazine et a concédé à ce titre ses droits d’auteur.

 

En octobre 2011, la société GS Media a publié sur le site d’informations GeenStijl qu’elle exploite aux Pays-Bas un article relatif à ces photos, en faisant apparaître un lien hypertexte renvoyant sur le site australien Filefactory, publiant lesdites photographies.

 

Saisie de cette affaire, la Cour d’appel d’Amsterdam a estimé qu’en plaçant les liens hypertexte sur le site GreenStijl, la société GS Media n’avait pas porté atteinte au droit d’auteur du photographe, dès lors que les photographies avaient été rendues publiques auparavant par leur mise en ligne sur le site internet Filefactory.

 

Dans le cadre de l’examen du pourvoi formé par la société GS Media, la Cour suprême des Pays-Bas a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour de justice de l’Union européenne une question préjudicielle tendant à déterminer si le fait de placer sur un site internet un lien hypertexte vers des œuvres protégées, librement disponibles sur un autre site sans l’autorisation du titulaire du droit d’auteur constituait une « communication au public » au sens de la directive de 2001.

 

Après avoir rappelé que la directive de 2001 a pour objectif principal d’instaurer un niveau élevé de protection en faveur des auteurs, la Cour de justice de l’Union européenne en déduit que la notion de « communication au public » doit être entendue au sens large.

 

La Cour précise en outre que la notion de « communication au public » implique une appréciation individualisée selon plusieurs critères complémentaires, aux rangs desquels figurent le rôle joué par l’utilisateur et le caractère délibéré de son intervention, la communication des œuvres auprès d’un public nouveau, ainsi que le caractère lucratif de la communication.

 

Concernant le cas particulier de la publication de liens hypertexte renvoyant à des œuvres protégées par le droit d’auteur, la Haute juridiction fait application comme suit de ces critères :

 

« Aux fins de l’appréciation individualisée de l’existence d’une « communication au public », au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/29, il convient ainsi, lorsque le placement d’un lien hypertexte vers une œuvre librement disponible sur un autre site internet est effectué par une personne qui, ce faisant, ne poursuit pas un but lucratif, de tenir compte de la circonstance que cette personne ne sait pas, et ne peut pas raisonnablement savoir, que cette œuvre avait été publiée sur internet sans l’autorisation du titulaire des droits d’auteur ».

 

S’agissant de l’affaire au principal, il n’est pas contestable que la société GS Media a fourni les liens hypertexte à des fins lucratives et que la société Sanoma n’avait pas autorisé la publication de ces photographies sur internet, ce dont la société GS Media était parfaitement consciente, de sorte que la société GS Media a réalisé une « communication au public » au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive de 2001.

 

Virginie PEREDRIEUX

Vivaldi-Avocats

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