La CNIL sanctionnée pour ne pas avoir anonymisé le nom d’un tiers

Virginie PERDRIEUX
Virginie PERDRIEUX

  

SOURCE : CE, 10ème et 9ème SSR, 11 mars 2015, n°372884, société Election Europe c/ Commission nationale de l’informatique et des libertés

 

En l’espèce, par délibération en date du 11 avril 2013, la CNIL, saisie d’une plainte d’un syndicat, a prononcé un avertissement à l’encontre de la société Total Raffinage Marketing pour avoir organisé des élections professionnelles au moyen d’un système de vote électronique mis en place par la société Election Europe, ne respectant pas certaines dispositions de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, et a assorti sa décision d’une publication sur son site Internet et sur le site Légifrance.

 

Par courrier en date du 24 juin 2013, la société Election Europe a demandé à la Présidente de la CNIL que les mentions de la délibération la concernant ne soient pas publiées, puisque, bien que non poursuivie dans le cadre de cette procédure, elle était visée comme ayant élaboré le système électronique en litige.

 

Pour justifier son refus d’accéder à la requête de la société Election Europe, la Présidente de la CNIL, par décision du 19 août 2013, a soulevé une fin de non-recevoir, selon laquelle la requérante aurait dû présenter préalablement sa demande d’anonymisation à la formation restreinte de l’autorité administrative, seule investie du pouvoir de réexaminer les sanctions qu’elle a prononcées.

 

Le Conseil d’Etat, saisi par la société Election Europe d’une requête en excès de pouvoir, finira par annuler la décision du 19 août 2013, en retenant que l’examen de la demande d’un tiers aux poursuites, tenant à l’absence de publication des mentions le concernant figurant dans une décision de sanction ou à l’anonymisation de telles mentions, ne se rattache pas aux pouvoirs de sanction de la formation restreinte de la CNIL, mais relève bien de la compétence de sa Présidente.

 

Au terme de leur décision, les Juges du Palais Royal délivrent l’attendu suivant, ayant valeur de principe à l’encontre de la CNIL :

 

« Considérant que lorsqu’un tiers demande soit qu’il ne soit pas procédé à la publication des mentions le concernant figurant dans une décision de sanction prononcée par la CNIL dont le dispositif ne lui fait pas grief, soit l’anonymisation de telles mentions dans la version publiée de cette sanction, l’autorité compétente est tenue de faire droit à cette demande, sous la seule réserve de la vérification de l’existence des mentions en litige ».

 

Par la présente décision, le Conseil d’Etat a entendu rappeler à la CNIL que, bien qu’investie de pouvoirs réglementaires et de sanction étendus, cette autorité administrative indépendante doit elle-même veiller à respecter les obligations découlant de la loi du 6 janvier 1978, relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, sous le contrôle de la juridiction administrative.

 

Virginie PERDRIEUX

Vivaldi-Avocats

 

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