Actes conservatoires et indivision : qualité à agir d’un seul Coindivisaire

Marion MABRIEZ
Marion MABRIEZ - Avocat

Source: Arrêt n°346 du 28 mai 2020 de la Cour de Cassation, Troisième Chambre Civile, 19-14.156

 

Dans cette affaire, un groupement foncier agricole avait pris à bail des terres auprès d’une indivision composée de deux personnes.

 

Plusieurs instances avaient opposé le groupement foncier agricole et l’un des indivisaires, concernant la détermination du prix du fermage et son paiement, ainsi qu’à propos de la consistance du vignoble.

 

Un arrêt avait par ailleurs condamné le groupement foncier agricole à remettre en état une parcelle, et ce sous astreinte.

 

C’est dans ces conditions que l’un des indivisaires a saisi le Juge de l’Exécution en liquidation d’astreinte, afin qu’il en soit prononcé une nouvelle.

 

La Cour d’Appel d’Angers a rejeté la demande de liquidation d’astreinte et le prononcé d’une nouvelle, au visa de l’article 815-3 du Code Civil, disposant que les actes d’administration relatifs aux biens indivis peuvent être effectués par le ou les indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis.

 

La Cour de Cassation a néanmoins cassé l’arrêt rendu par la Cour d’Appel d’Angers, et ce au visa de l’article 815-2 du Code Civil, qui dispose :

 

« Tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis même si elles ne présentent pas un caractère d’urgence ».

 

En somme, la Cour a estimé que la demande de liquidation de l’astreinte et le prononcé d’une nouvelle devaient être assimilés à des actes conservatoires et non pas à des actes d’administration.

 

Dans ces conditions, l’indivisaire à l’origine de la procédure initiée devant le Juge de l’Exécution avait parfaitement qualité pour formuler ces demandes.

 

En somme, tout indivisaire peut passer seul les actes matériels ou juridiques, voire engager seul une action en justice dès lors qu’ils ont pour objet de soustraire les biens indivis à un péril, sans pour autant que ces actions ou ses actes compromettent les droits des autres indivisaires.

 

Il convient par ailleurs de préciser que le législateur a entendu modifier les dispositions de l’article 815-2 par la loi du 1er janvier 2007, permettant ainsi à tout indivisaire de procéder à la réalisation d’acte conservatoire portant sur le bien indivis, même pour le cas où aucune urgence n’est caractérisée.

 

L’article 846-2 permet donc aux indivisaires de réaliser des actes conservatoires avec facilité contrairement aux actes d’administration relatifs aux biens indivis nécessitant l’accord de la majorité des deux tiers des droits indivis pouvant être source de blocage.

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