Réitération des enchères : la possible annulation du jugement pour excès de pouvoir

Jacques-Eric MARTINOT
Jacques-Eric MARTINOT - Avocat

Source : Cass.Civ.2., 09 juin 2022, n°20-21352, n°617 B

Au terme d’une procédure de saisie immobilière, l’adjudicataire, bien qu’ayant payé les frais préalables, s’abstient de payer le montant du prix de vente. Sur ce motif, le créancier poursuivant sollicite la réitération des enchères, mais omet de porter à la connaissance du premier adjudicataire la nouvelle date d’audience.

Ainsi, une fois la nouvelle adjudication intervenue, l’adjudicataire défaillant formera un pourvoi contre le nouveau jugement d’adjudication sollicitant son annulation.

Au centre du pourvoi, l’application de l’article R322-69 du Code des procédures civiles d’exécution qui précise :

« Faute pour l’adjudicataire de satisfaire à la sommation qui lui a été faite, l’immeuble est remis en vente par la voie d’une nouvelle adjudication.

La nouvelle audience de vente est fixée par le juge de l’exécution sur requête de la partie qui poursuit la réitération des enchères, à une date comprise dans un délai de deux à quatre mois suivant la date de la signification du certificat du greffe à l’acquéreur.

En cas de contestation du certificat prévu à l’article R. 322-67, ce délai court à compter de la date de la décision de rejet. Le débiteur saisi, le créancier poursuivant, les créanciers inscrits et l’adjudicataire défaillant sont avisés par le greffe de la date de l’audience par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. »

Faute d’avoir été avisé de la date, l’adjudicataire défaillant conteste la décision pour excès de pouvoir.

La Cour accueillera le pourvoi de la manière suivante :

« Réponse de la Cour

Vu l’article R. 322-69, alinéa 4, du code des procédures civiles d’exécution :

12. Selon ce texte, en cas de réitération des enchères, le débiteur saisi, le créancier poursuivant, les créanciers inscrits et l’adjudicataire défaillant sont avisés par le greffe de la date de l’audience par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

13. En effet, si, en application de l’article L. 322-12 du code des procédures civiles d’exécution, la vente par adjudication est résolue de plein droit à défaut de versement du prix ou de sa consignation et de paiement des frais, elle ne peut être constatée qu’en l’absence de consignation ou de versement du prix et de paiement des frais à la date où le juge statue, y compris à l’occasion de la procédure de réitération des enchères.

14. Par ailleurs, selon ce même article, l’adjudicataire défaillant est tenu au paiement de la différence entre son enchère et le prix de la revente, si celui-ci est moindre et ne peut prétendre à la répétition des sommes qu’il a acquittées.

15. Il en résulte que l’adjudicataire défaillant, propriétaire du bien adjugé tant que la résolution de la vente n’a pas été constatée, doit être appelé à l’audience d’adjudication sur réitération des enchères, à laquelle il est partie.

16. Or, constitue un excès de pouvoir le fait pour un juge de statuer sans qu’une partie ait été entendue ou dûment appelée.

17. Dès lors qu’il ne ressort ni de la décision, ni des productions, que la société SCI JB ait été avisée de la date d’adjudication, le juge de l’exécution, en adjugeant le bien à la société Immobilière Suffren, a excédé ses pouvoirs.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT que le pourvoi est recevable ;

CASSE ET ANNULE »

En tout état de cause, l’adjudicataire défaillant doit être appelé à l’audience au regard notamment en sa qualité de propriétaire du bien jusqu’à la nouvelle adjudication, mais également de son obligation sur la différence de prix qui pourrait naitre.

Le premier juge est sanctionné pour excès de pouvoir.

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