Source : CE, 22/02/2017, n°398168, mentionné dans les tables du recueil Lebon
Dans le cadre de ses opérations de contrôle, l’administration fiscale est en droit d’obtenir de la part de tiers des renseignements que ceux ci peuvent détenir sur le contribuable vérifié.
Si les documents obtenus grâce à l’exercice de ce droit de communication sont utilisés pour établir une imposition supplémentaire, l’administration fiscale est tenue, en vertu de l’article L76 du LPF, d’informer le contribuable de la teneur et de l’origine de ces renseignement et documents.
Par ailleurs, ce même article oblige l’administration fiscale à communiquer, avant la mise en recouvrement, les documents ou copie de documents utilisés pour procéder aux rectifications si le contribuable lui en fait la demande dans le même délai.
A défaut, la procédure est irrégulière et peut être annulée.
Dans deux précédents arrêts commentés dans le cadre de cette newsletter[1], le Conseil d’Etat avait jugé que si l’obligation de communication ne portait que sur des documents qui étaient encore en la possession de l’administration fiscale, celle-ci devait porter à la connaissance du contribuable l’ensemble des renseignements fondant l’imposition dont elle a eu connaissance afin, notamment, de lui permettre de s’adresser au tiers détenant les documents en cause pour les consulter à son tour.
Dans l’arrêt commenté, le Conseil d’Etat reprend la même solution mais en rédigeant son arrêt par des termes plus généraux tout en précisant certains points.
« il incombe à l’administration, quelle que soit la procédure d’imposition mise en œuvre, d’informer le contribuable, avec une précision suffisante, de l’origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers sur lesquels elle s’est fondée pour établir l’imposition, afin de permettre à l’intéressé, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander que les documents, qui, le cas échéant, contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ».
(…)
« dans l’hypothèse où les documents que le contribuable demande à examiner sont détenus, non par l’administration fiscale, qui les a seulement consultés à l’occasion d’une vérification de comptabilité concernant une autre société, mais par cette dernière, il appartient à l’administration fiscale, d’une part, d’en informer l’intéressé afin de le mettre en mesure d’en demander communication à ce tiers, et, d’autre part, de porter à sa connaissance l’ensemble des renseignements fondant l’imposition recueillis à l’occasion de la vérification de comptabilité de cette autre société ».
Le Conseil d’Etat précise ainsi que cette obligation s’applique quelque soit la procédure mise en œuvre. Elle s’applique donc même en cas de procédure d’imposition d’office qui réduit fortement les droits du contribuable.
Il ressort en outre de cet arrêt que l’administration fiscale doit informer le contribuable avec « une précision suffisante ». Elle ne peut se borner à indiquer au contribuable qu’elle a utilisé des éléments émanant de tiers mais doit le renseigner sur l’identité du tiers et du contenu des informations obtenues.
Enfin, cette obligation de communication est valable que le tiers soit une autorité publique (cas des arrêts de 2015) ou une autre société de droit privé (cas ici commenté).
La rédaction de l’arrêt lui permet ainsi d’avoir une portée générale visant à une application la plus large possible en faveur du contribuable.
Le Conseil d’Etat s’assure ainsi que l’administration donne toutes les informations nécessaires au contribuable afin que celui-ci puisse être correctement informé même s’il n’a pas accès aux documents utilisés.
Caroline DEVE
Vivaldi-Avocats
[1] CE 18/03/2015 n°370128 mentionné dans les tables du recueil Lebon et CE 27/03/2015 n°375409 et notre commentaire du 1er juin 2015, “L’obligation de communication des informations obtenues auprès de tiers par l’administration fiscale est renforcée par le Conseil d’Etat“