Les revenus fonciers du locataire âgé de plus de soixante-cinq ans à prendre en compte pour déterminer si le montant de ses ressources excède le plafond en deçà duquel le bailleur qui lui délivre congé est tenu, en application de l’article 15, III, de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, de lui proposer un relogement correspondant à ses besoins et à ses possibilités, sont les revenus fonciers bruts.
Cour de cassation, 2 octobre 2025 n° 24-12.308
I –
Les propriétaires d’un logement donné à bail ont délivré à leur locataire un congé pour reprise, puis l’ont assignée en validation de ce congé, expulsion, paiement d’une indemnité d’occupation et de dommages-intérêts.
II –
La cour d’appel a déclaré valide le congé, à condamner la locataire à libérer les lieux sous astreinte, à ordonner son expulsion à défaut de libération volontaire et l’a condamnée à payer aux bailleurs une indemnité d’occupation ainsi que diverses sommes à titre de dommages-intérêts.
La locataire a formé un pourvoi en cassation et conteste cette décision en soutenant que le congé violerait l’article 15, III, de la loi du 6 juillet 1989, dans sa rédaction issue de la loi du 24 mars 2014.
Elle fait valoir que le bailleur ne peut délivrer un congé pour reprise ou pour vente à un locataire de plus de 65 ans dont les ressources annuelles sont inférieures au plafond applicable pour l’attribution des logements locatifs conventionnés, sans lui proposer un logement adapté.
Pour apprécier le respect de ce plafond, seuls les revenus fonciers nets imposables doivent être pris en compte et non les revenus fonciers bruts.
La locataire reproche ainsi à la cour d’appel d’avoir pris en compte ses revenus fonciers bruts pour estimer qu’elle dépassait le plafond de ressources et, par conséquent, d’avoir déclaré le congé valable alors qu’elle aurait dû bénéficier de la protection prévue par l’article 15, III.
III –
La Cour de cassation rejette le pourvoi en cassation et rappelle que selon le premier alinéa de l’article 15, III, de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, le bailleur ne peut s’opposer au renouvellement du contrat de location à l’égard de tout locataire âgé de plus de soixante-cinq ans et dont les ressources annuelles sont inférieures au plafond de ressources en vigueur pour l’attribution des logements locatifs conventionnés fixé par arrêté du ministre chargé du logement, sans qu’un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités lui soit offert.
La Haute juridiction ajoute qu’il résulte de ce texte, qui ne renvoie à l’arrêté du ministre chargé du logement relatif aux plafonds de ressources en vigueur pour l’attribution des logements locatifs conventionnés que pour la fixation du plafond de ressources et non pour le mode de calcul des ressources à prendre en considération, que les ressources annuelles du locataire à prendre en compte sont celles déclarées à l’administration fiscale avant tout abattement ou déduction.
Par conséquent, la cour d’appel a, à bon droit, tenu compte des revenus fonciers bruts de la locataire pour apprécier si le montant de ses ressources excédait le plafond en deçà duquel elle aurait dû bénéficier d’une offre de relogement.
IV –
Dans cet arrêt, la Cour de cassation précise que les ressources annuelles du locataire à prendre en compte sont donc les revenus bruts déclarés à l’administration fiscale.
Cette mise au point s’inscrit dans un contentieux nourri autour du régime protecteur du locataire âgé.
La Haute juridiction poursuit ainsi la clarification des conditions encadrant le congé délivré à un locataire protégé.
Elle avait déjà précisé, dans un arrêt du 24 octobre 2024 (Cass. 3e civ., n° 23-18.067), que les ressources à prendre en compte sont celles perçues au cours des douze mois précédant la délivrance du congé, le montant des ressources du locataire étant apprécié à la date de notification de celui-ci.
Ces décisions, complémentaires, renforcent la lisibilité du dispositif et participent à concilier la protection du locataire âgé avec la sécurité juridique du bailleur.

