Le permis de faire

Harald MIQUET
Harald MIQUET

 

Source : Décret n° 2017-10 044 du 10 mai 2017 portant expérimentation en matière de construction[1].

 

Pris en application de l’article 88 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, les dispositions réglementaires du décret n° 2017-1044 du 10 mai 2017 ouvrent la voie à l’expérimentation du « permis de faire ».

 

L’objectif de ce permis est d’autoriser à titre expérimental et pour une durée de sept ans, plusieurs catégories de personnes morales de droit public – l’Etat, les collectivités territoriales ainsi que leurs groupements, les organismes à loyers modérés, les sociétés d’économie mixte de construction et de gestion des logements sociaux – à déroger à certaines règles du Code de la construction.

 

Il convient à titre liminaire de préciser que les projets de construction éligibles à l’expérimentation ne concernent que les projets de construction qui comportent au moins 75% de leur surface de plancher dédiés aux équipements publics ou aux logements sociaux réalisés par les personnes publiques susvisées.

 

Sur la nature de cette dérogation, il convient d’indiquer que celle-ci n’a pas pour finalité de déroger à la finalité des normes et des règles du Code de la construction et de l’habitation applicables en matière d’accessibilité, de stabilité des éléments principaux, et de règles de lutte contre la propagation des incendies, mais bien d’instaurer une logique d’obligation de résultat qui prime une logique prescriptive.

 

Comme le précise le rapport d’information déposé par la Commission des Affaires Culturelles et d’Education sur la création architecturale[2] qui a inspiré et préfiguré l’article 88 de la loi relative à la liberté de la création à l’architecture et au patrimoine, il s’agit de favoriser une approche de la norme par objectif et non par moyen, dans le but d’accélérer la construction de logements et d’en diminuer le coût.

 

Concrètement, le maître d’ouvrage devra adresser la demande de dérogation aux règles de construction au ministre chargé de l’architecture et de la construction en spécifiant la nature et le caractère innovant du projet architectural projeté.

 

Le maître d’ouvrage devra préciser quelles sont les règles auxquelles le projet est susceptible de déroger, l’évaluation des risques induits par ces solutions alternatives ; l’évaluation de l’impact de ces solutions alternatives sur le coût des constructions.

 

L’originalité de la constitution du dossier de la demande du permis de faire se situe également dans la nature du contrôle exercé à l’encontre de l’analyse du porteur du projet. Ce contrôle vise à vérifier que les résultats projetés par dérogation sont similaires à ceux qui résulteraient de l’application des règles normalement applicables.

 

Le contrôle de la mise en œuvre des dispositions dérogatoires est effectué par une tierce partie indépendante ayant signé une convention avec les ministres chargés de l’architecture et de la construction. Cette tierce partie est tenue de transmettre au ministre compétent un document attestant du contrôle effectué et comparant les résultats obtenus par rapport aux résultats attendus.

 

En cas de différentiel significatif, les ministres compétents dument informés pourront adresser au maître d’ouvrage une mise en demeure de se conformer à ces obligations.

 

En cas de non-respect de ces obligations au terme du délai fixé par la mise en demeure, les ministres compétents pourront décider que la réalisation du projet se poursuivra dans le respect des règles initiales.

 

Il y a donc lieu de souligner l’originalité de la procédure de contrôle qui repose sur un mécanisme faisant intervenir un tiers conventionné dont l’avis pourra se révéler déterminant dans la décision que prendra l’administration.

 

Très clairement, les dispositions réglementaires ne placent pas les ministères en position de compétence liée par rapport à cet avis.

 

La décision expresse d’accorder la dérogation sollicitée est prise conjointement par les ministres chargés de l’architecture et de la construction au vu du dossier de demande constituée ainsi que sur la base des avis émis par la Commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité ainsi que le Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique.

 

L’accord de l’administration peut également être constitué par le silence gardé par les ministres sollicités pendant une durée de 6 mois à compter de la réception du dossier complet.

 

S’agissant d’une expérimentation d’une durée de sept années, les ministres chargés de la construction et de l’architecture seront tenus de procéder à une évaluation de ce dispositif.

 

Harald MIQUET

Vivaldi-avocats

 


[1] JORF n°0110 du 11 mai 2017, texte n° 210

[2] http://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-info/i2070.asp

 

 

 

 

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