TVA : Dépenses engagées par la succursale française d’une société établie dans l’UE

Eric DELFLY
Eric DELFLY - Avocat associé

SOURCE : CJUE 24/01/2019, n° C-165/17, arrêt Morgan STANLEY

 

I – 

 

Saisie par le Conseil d’Etat d’une question préjudicielle[1], la Haute Juridiction Européenne avait à se prononcer sur la détermination des droits à déduction de la TVA de la succursale française de la banque britannique, lorsque cette succursale engage :

 

   D’une part, des dépenses exclusivement affectées aux besoins de son siège ;

 

   D’autre part, des dépenses communes à ses activités et celles du siège.

 

Cette question était fondamentale, puisqu’en France, les activités de la succursale au profit des tiers étaient soumises à la TVA, conformément à l’option qui avait été exercée au visa de l’article 260-B du CGI, alors qu’en ce qui concerne celle du siège, elle ne l’était qu’à un montant relativement faible.

 

II –

 

Dans sa décision commentée, la Cour se livre à une analyse in concreto de chaque dépense et en tire les conséquences sur le montant de TVA (français ou britannique) susceptible d’être déduit.

 

Elle en déduit ainsi un mécanisme d’affectation pour l’ensemble des dépenses qui ne sont pas affectables spécifiquement à une recette taxable ou exonérée de la succursale française ou du siège.

 

Sur le principe, le mécanisme est simple à comprendre, mais quid de l’affectation de la TVA lorsque les dépenses ne sont pas rattachables spécifiquement à une recette taxable ou exonérée de la succursale ou du siège ?

 

S’agissant des dépenses engagées par la succursale pour les besoins des activités du siège, la Cour juge qu’elle sont détaxables en application d’un prorata spécifique prenant en compte au numérateur les seules recettes du siège auquel les dépenses contribuent et qui ouvrent droit à déduction de la TVA dans l’Etat membre du siège, et qui couvriraient  également droit à déduction, si elles étaient réalisées dans l’Etat membre de la succursale et au numérateur, l’ensemble des recettes du siège auquel les dépenses contribuent.

 

La société ne peut donc pas se limiter à appliquer à ces dépenses le prorata général du siège, il doit identifier et retenir uniquement les opérations du siège auquel concourent les dépenses supportées par la succursale (et ce n’est pas une tâche facile).

 

S’agissant par ailleurs des dépenses engagées par la succursale à la fois pour des activités propres et pour celles du siège (activités mixtes), la Cour juge qu’elles sont détaxables en application d’un prorata différent au numérateur l’ensemble des recettes ouvrant droit à la déduction de la TVA de la succursale, et l’ensemble des recettes ouvrant droit à la déduction du siège, à nouveau à la condition que ces recettes du siège aient également ouvert droit à déduction si elles avaient été réalisées dans l’Etat membre de la succursale et au dénominateur l’ensemble des recettes de la succursale et du siège.

 

C’est ici, mais en matière de TVA, le phénomène n’est pas nouveau, une illustration de la complexité de l’application de la fiscalité dans les relations intra UE.

 

[1] CE 3ème et 8ème Chambre réunies 29/03/2017, n° 389105 Société Morgan STANLEY & Co

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